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20 juillet 2021 2 20 /07 /juillet /2021 20:58

pour consulter l'article complet, taper El Galeon en escale Quai Alexandre III.

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13 juin 2021 7 13 /06 /juin /2021 13:26
© S. Fenoulière

© S. Fenoulière

Le Mutin, quai Alexandre III, avec le grand pavois.

 

Il a bénéficié d'un grand carénage, qui l'a immobilisé un certain temps à Brest, pour refaire des couples et un certain nombre de bordés

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2 février 2020 7 02 /02 /février /2020 15:05
© S. Fenoulière

© S. Fenoulière

Une grue de taille assez impressionnante installée sur la barge Nevez a commencé à enfoncer des pieux au nord du quai de France, afin de rallonger celui-ci, qui risque d'être trop court dans peu de temps en raison de l'accroissement monstrueux des paquebots de croisière.

© S. Fenoulière

© S. Fenoulière

Independance of the Seas quitte Cherbourg. 339 m de long.

les paquebots de croisière les plus récents peuvent transporter 6000 passagers, auxquels s'ajoutent plus de mille membres d'équipage.

Avec ces paquebots, de plus en plus nombreux, le quai doit également accueillir des car ferries de plus en plus gros. On est loin des 99m du Viking 1, de couleur orange, accueilli à la passerelle N° 1, toujours en place mais partiellement démolie par un carferry ayant rompu ses amarres. L'allongement du quai permettra d'accueillir deux paquebots ensemble, au lieu d'en isoler au quai de Normandie.

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18 janvier 2020 6 18 /01 /janvier /2020 13:00
© S. Fenouliere

© S. Fenouliere

Après Connemara, qui a remplacé Barfleur pendant son carénage, Baie de Seine, de la Brittany Ferries vient d'accoster à Cherbourg. On peut penser que cette escale inhabituelle est en relation avec la fermeture du port du Havre par la grève des dockers.

De même, le Stena Foreteller, un cargo roll-on roll-off, peut-être destiné à remplacer temporairement Horizon, est, par sa taille, manifestement destiné à absorber une partie du trafic géré par Le Havre.

© S. Fenouliere

© S. Fenouliere

Foreteller à quai.

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26 octobre 2019 6 26 /10 /octobre /2019 13:49

© textes et illustrations, sauf précisions contraires.

 

Ce blog n'étant pas conçu pour une étude longue, il faudrait commencer par la fin pour qu'il en respecte l'ordre logique, car il empile les articles dans l'ordre où ils sont frappés. Le premier chapitre est donc renvoyé en dernière position, le second, en avant-dernière, etc....

Le Marité quitte Saint-Vaast pour retouver son éclat d'antan.

(Pour agrandir les photos, cliquer dessus.)

Le MARITE A GRANVILLE, LA RENAISSANCE

Le Marité quitte le port de Saint-Vaast pour Granville.

Le MARITE A GRANVILLE, LA RENAISSANCE

 

Le gréeur du bord finira la mise en place des mâts avec ses outils : ciseaux, couteau, aiguille, épissoir.

 

Une bonne partie de ce qui fait la beauté du bateau reposera sur lui, à Granville.

Le MARITE A GRANVILLE, LA RENAISSANCE

Mâture. Dans son ancienne version, Marité a trois voiles auriques et seulement trois voiles carrées.

Le MARITE A GRANVILLE, LA RENAISSANCE

C’est à Granville que le chantier Bernard, le voilier Eric Varin et le gréeur Yves Capard ont rendu sa voilure complète à Marité, légèrement différente de la précédente, mais conforme à celle de son lancement. On note quatre voiles carrées, à savoir, de haut en bas, le perroquet, le petit hunier, le grand hunier et la misaine. La première voile aurique, au mât de misaine, a été remplacée par une grande voile d’étai, triangulaire et bômée, Marité retrouvant ainsi son premier gréement.

Le MARITE A GRANVILLE, LA RENAISSANCE

Jonction des parties supérieures du mât de misaine.

Le MARITE A GRANVILLE, LA RENAISSANCE

Au détour du rempart.

 

Les quatre vergues, portant leur voile, avec le perroquet et le faux foc déployés, sont nettement visibles.

Le MARITE A GRANVILLE, LA RENAISSANCE

Fixation du petit foc sur le beaupré.

Le MARITE A GRANVILLE, LA RENAISSANCE

Le chef de chantier contrôle le mât de misaine, seul mât entièrement neuf.

 

Le MARITE A GRANVILLE, LA RENAISSANCE

Le voilier fixe le faux foc sur son étai.

Le MARITE A GRANVILLE, LA RENAISSANCE

Le petit foc est déployé.

Le MARITE A GRANVILLE, LA RENAISSANCE

Le voiler Eric Varin tend le perroquet sur sa vergue.

Le MARITE A GRANVILLE, LA RENAISSANCE

La bôme attend sa voile de contre-étai.

Le MARITE A GRANVILLE, LA RENAISSANCE

Fixation de la voile sur l’étai.

Le MARITE A GRANVILLE, LA RENAISSANCE

Réglage de la voile de contre-étai sur la bôme.

Le MARITE A GRANVILLE, LA RENAISSANCE

Le faux foc et la voile de contre-étai hissés.

Le MARITE A GRANVILLE, LA RENAISSANCE

Gréement du petit hunier.

 

Le MARITE A GRANVILLE, LA RENAISSANCE

Fixation du grand hunier.

Le MARITE A GRANVILLE, LA RENAISSANCE

 

Le grand hunier, avec ses cargues.

Le MARITE A GRANVILLE, LA RENAISSANCE

Repli de la misaine à bord de Shabab Oman, navire école précédent de la marine du Sultanat d’Oman.

 

Ce document montre à quel point les voiles carrées peuvent être consommatrices de main-d’œuvre.

Le MARITE A GRANVILLE, LA RENAISSANCE

Le grand hunier et la misaine sont déployés.

 

Marité, équipée de toutes ses voiles, peut prendre la mer. Le samedi 29 juin 2012, après la bénédiction du navire par l’évêque de Coutances, le navire fera une superbe sortie sous voiles, sans, toutefois, hisser les voiles carrées. Le matin même, avant la cérémonie, on procède encore à quelques travaux de finition.

Le MARITE A GRANVILLE, LA RENAISSANCE

 

Voile d’étai déployée.

Le MARITE A GRANVILLE, LA RENAISSANCE

Le technicien réalise les derniers branchements.

 

Les mécaniciens et électroniciens travaillant en général à l’intérieur, on voit peu leur travail. Ici, le jeune technicien branche des instruments de navigation.

Le MARITE A GRANVILLE, LA RENAISSANCE

Le gréeur du bord découpe des fourrures.

 

Les fourrures enroulées autour des haubans protègent ces derniers contre le frottement des voiles.

Le MARITE A GRANVILLE, LA RENAISSANCE

La fourrure est enroulée et tassée sur elle-même.

Derniers ajustements avant la bénédiction

Le MARITE A GRANVILLE, LA RENAISSANCE

On cargue soigneusement les voiles.

Le MARITE A GRANVILLE, LA RENAISSANCE

Les vergues sont brassées impeccablement.

Le MARITE A GRANVILLE, LA RENAISSANCE
Le MARITE A GRANVILLE, LA RENAISSANCE

Le porte-voix est utilisé pour communiquer avec les hommes sur les vergues.

Le MARITE A GRANVILLE, LA RENAISSANCE

Sur la vergue de misaine.

 

Pour la bénédiction, Marité se doit d’être parfaite. On cargue soigneusement les voiles, pas un bout ne dépasse, ou alors, il est impitoyablement brûlé, on observe si la vergue est brassée correctement par rapport aux autres…

Le MARITE A GRANVILLE, LA RENAISSANCE

Le jeune voilier coupe les extrémités inutiles.

La corde du bord

 

Marité n’étant pas destinée à poser des lignes, elle n’a qu’une seule corde, qui suscite pas mal d’intérêt, même chez les professionnels. La pose de la cloche nécessite de fixer une corde dans l’anneau. Cela ne peut pas être un vulgaire bout de corde. C’est une véritable œuvre de matelotage.

Le MARITE A GRANVILLE, LA RENAISSANCE

La cloche est en attente, sans corde.

Le MARITE A GRANVILLE, LA RENAISSANCE

Le gréeur utilise un gros épissoir.

Le MARITE A GRANVILLE, LA RENAISSANCE

On apprécie le travail de l’homme de l’art.

Pour bien briser la bouteille

 

Un « baptême » sans briser une bouteille de champagne sur la coque est inconcevable. On règle donc soigneusement la longueur du bout et l’angle sous lequel Jacques Gamblin, parrain du Marité, devra lâcher la bouteille sur l’étrave. Car c’est l’un des événements les plus attendus : ne pas casser la bouteille du premier coup porterait la poisse.

Le MARITE A GRANVILLE, LA RENAISSANCE

Une manille remplace la bouteille.Par mesure de sécurité, une  bouteille d’eau est testée par le patron en personne.

Le MARITE A GRANVILLE, LA RENAISSANCE

Par mesure de sécurité, une  bouteille d’eau est testée par le patron en personne.

Le MARITE A GRANVILLE, LA RENAISSANCE

La bouteille vient d’exploser sur l’ancre.

 

 

 

On note encore quelques petites finitions à la poupe. On rabote les caillebotis

Le MARITE A GRANVILLE, LA RENAISSANCE

et on finit de scier la hampe.

 

 

 

 

Le MARITE A GRANVILLE, LA RENAISSANCE

Le pavillon flotte.

Le MARITE A GRANVILLE, LA RENAISSANCE

On apporte la demi-coque.

La bénédiction

 

Elle est certainement autant attendue que la sortie de l’après-midi. La construction de navires de pêche neufs étant freinée par Bruxelles, la hausse des prix du gazole et les cours du poisson au plus bas, la bénédiction de bateaux devient assez rare dans nos ports. Monseigneur Lalanne rappelait que l’on appelle à tort cette cérémonie “baptême“. Pour la circonstance, l’équipage a revêtu l’uniforme de cérémonie, les matelots portant la culotte à pont bleu-marine et la chemise blanche et le patron, la veste bleu-marine à boutons dorés :

Le MARITE A GRANVILLE, LA RENAISSANCE

Tenue de cérémonie pour l’équipage.

Le MARITE A GRANVILLE, LA RENAISSANCE

L’évêque de Coutances, Monseigneur Lalanne, arrive à bord.

Le MARITE A GRANVILLE, LA RENAISSANCE

Monseigneur Lalanne bénit le navire.

Le goupillon est remplacé par un rameau de buis. Lors de ces cérémonies chez Bellot, le prêtre répandait également du sel et du blé sur le pont.

Le MARITE A GRANVILLE, LA RENAISSANCE

Le micro enregistre le tintement.

 

Jacques Gamblin, parrain du Marité vient d’installer définitivement la cloche et de la faire tinter. Il lui reste à briser la bouteille sur l’étrave du bateau, et mieux vaut réussir du premier coup.

Le MARITE A GRANVILLE, LA RENAISSANCE

 L’assistance retient son souffle.

Le MARITE A GRANVILLE, LA RENAISSANCE

Tout le monde est soulagé, la bouteille est brisée.

Le MARITE A GRANVILLE, LA RENAISSANCE

La cérémonie est terminée, Jacques Gamblin s’adresse à la foule.

La sortie du 29 juin

Le MARITE A GRANVILLE, LA RENAISSANCE

 

Le déhalage est applaudi.

Le MARITE A GRANVILLE, LA RENAISSANCE

Deux bateaux chers aux Granvillais.

Le MARITE A GRANVILLE, LA RENAISSANCE

Dès la sortie du port, la brigantine est hissée.

 

Il est intéressant de noter que les voiles sont hissées de l’arrière vers l’avant.

Le MARITE A GRANVILLE, LA RENAISSANCE

C’est, ensuite, le tour de la grand-voile.

 

Le passé et le présent se rencontrent. Noter la poupe des chalutiers modernes.

Le MARITE A GRANVILLE, LA RENAISSANCE

Marité vire au large.

Le MARITE A GRANVILLE, LA RENAISSANCE

Marité et la SNS.

Le MARITE A GRANVILLE, LA RENAISSANCE

Seul, face à la mer, à Marité ou aux deux ?

Le MARITE A GRANVILLE, LA RENAISSANCE

Marité et la Granvillaise.

Le MARITE A GRANVILLE, LA RENAISSANCE

Marité devant le musoir.

Le MARITE A GRANVILLE, LA RENAISSANCE

A bord, en mer.

Ce que Marité aurait pu devenir

Le MARITE A GRANVILLE, LA RENAISSANCE

Epave, Saint-Servan.

 

Il existe des épaves tristes et des belles. Marité aurait pu pourrir dans son coin, comme ce bateau, manifestement plus petit qu'elle. Marité est d'une conception beaucoup plus fine, son tableau arrière est oblique alors que celui-ci est presque vertical, et les fonds de cette épave sont beaucoup plus plats, avec peu de différence de tirant d'eau. Cette photo donne une idée de l'art du charpentier naval.

Le MARITE A GRANVILLE, LA RENAISSANCE

Il est des bateaux qui ne veulent pas complètement mourir.

 

Nous tenons à remercier

 

A l'étranger :

 

Monsieur l’Attaché Naval de l’Ambassade des Etats-Unis à Paris.

 

Doctor Michael J. Crawford et le personnel du Service Historique de la U. S. Navy. Naval Historical Center, Washington Navy Yard, Washington D.C. 20374-0571,

U. S. A.

 

Mr. R. B. Philbrick, Smithsonian Institution, Division of Transports, Washington,

U. S. A.

 

Mr. D. J. Lyon, M. A. , National Maritime Museum, Greenwich, Great Britain.

 

L’équipage 2006 de Pride of Baltimore II.

 

L’équipage et les stagiaires de Shabab Oman, juillet 2010.

 

 

 

 

En France :

 

Le GIP Marité et le Conseil général de la Manche, avec Monsieur Thierry Motte.

 

Monsieur Auger, Directeur du Chantier Bernard et tout le personnel, sans la participation desquels ce reportage ne pourrait exister.

 

Le Capitaine Patrice Franceschi, de La Boudeuse.

 

Les bénévoles et les membres de l'équipage à bord de La Boudeuse.

 

Monsieur Gérard Bourdais et les membres de l'association Les Voiles écarlates.

 

Clément Chedmail, Patron du Marité, et son équipage.

 

Monsieur Eric Varin et son personnel, de Voilerie granvillaise.

 

Monsieur Serge Loit, de l’association Voiles Cotentines.

 

Tous les intervenants des autres entreprises, qui ont accepté d’être photographiés dans leur travail.

 

Les personnes qui ont accepté de prendre des photos lorsque le bateau était inaccessible.

 

 

Bibliographie

 

Amiral Pâris, Souvenirs de Marine, tome 3, édition originale.

 

Capitaine Louis Lacroix, Les Derniers Négriers. Voyages de bois d'ébène.

 

Capitaine Louis Lacroix,  Les derniers voiliers morutiers terreneuvas, islandais, groenlandais, (1949).

 

 

INSTRUCTION ELEMENTAIRE ET RAISONNEE SUR LA CONSTRUCTION-PRATIQUE DES VAISSEAUX en forme de dictionnaire, par de Duranti de Lironcourt (Paris, chez J.B.G. Musier Fils, Libraire, Ed. originale)

 

 

La Varende, les Augustin Normand.

 

Legs Bretocq, série S 2G3, SHM Cherbourg. Les reproductions de plans sont des copies réduites faites à partir des originaux.

 

G. La Roërie,  Navires et Marins, tome II, Librairie Rombaldi, Paris, 1946

 

Sauf indication contraire, les photos et les copies de plans sont de Serge Fenoulière.

 

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12 octobre 2019 6 12 /10 /octobre /2019 17:37

© textes et illustrations, sauf précisions contraires.

 

Ce blog n'étant pas conçu pour une étude longue, il faudrait commencer par la fin pour qu'il en respecte l'ordre logique, car il empile les articles dans l'ordre où ils sont frappés. Le premier chapitre est donc renvoyé en dernière position, le second en avant-dernière position, etc...

Le MARITE 3 La RESTAURATION

Le Marité vient d’entrer en cale sèche.

 

Le Marité vient d’entrer en cale sèche pour des réparations censées durer environ six mois. Elles dureront, en fait, cinq ans, d’abord à Cherbourg, puis à Saint-Vaast-la-Hougue, au Chantier Bernard, et enfin, dans son nouveau port d’attache, Granville, ancien port morutier de première importance, avec Saint-Malo.

Le MARITE 3 La RESTAURATION

Premiers sondages. Sur sa ligne de tins. Marité est pavoisée pour l’arrivée de la course du Figaro 2006.

 

Lors de la bénédiction du navire, certains Granvillais, devant le bateau majestueux qui n’avait plus rien à voir avec ce qu’il était quand il est arrivé dans leur port, rappelaient leur déception lorsqu’ils ont vu ce « ponton ». Pourtant, un pas énorme venait d’être franchi dans une opération de restauration qui semblait plus que compromise à un certain moment. Les premiers sondages de la coque avaient, en effet, révélé des dégâts  beaucoup plus graves que prévu.

Le MARITE 3 La RESTAURATION

La coque a été grattée et les premiers bordés enlevés.

Le MARITE 3 La RESTAURATION

Début des travaux. Etrave ôtée.

 

Avant d’ôter l’étrave, on a pris soin de remplacer les bordés du bas, près de la quille et préservé le pont, pour empêcher la coque de se déformer.

Le MARITE 3 La RESTAURATION

La nouvelle étrave est en place.

 

La carène sera bordée en iroko et les œuvres mortes en chêne.Aucun navire en bois de quatre-vingt-dix ans n’a tous ses bois d’origine. La différence entre Marité et d’autres, c’est que tout a été fait en une seule fois, décision certainement plus sage que de le faire par petits bouts. Plus de cinq cents ans d’une activité qui a nourri la France si longtemps valent bien cet effort de préservation et de souvenir. La France oublie trop souvent qu’elle est l’un des pays ayant la plus grande façade maritime du monde et une si longue tradition de pêche lointaine.

Le MARITE 3 La RESTAURATION

 

Bois tors pour la fabrication des membrures.

 

Courber des pièces d’une telle épaisseur étant impossible, les bois tors dont la forme s’approche le plus possible de celle des membrures sont choisis sur pied. Les membrures, également appelées couples ou côtes, forment la carcasse du bateau. Les planches épaisses, constituant les bordés, sont clouées dessus.

Le MARITE 3 La RESTAURATION

Membrure en construction sur tréteaux.

 

Le MARITE 3 La RESTAURATION

Un autre couple est en fabrication au fond de la cale.

 

On voit également l’étuve, pour saturer les futurs bordés de vapeur, afin de pouvoir les plier pour les appliquer sur les membrures.

Le MARITE 3 La RESTAURATION

Membrures avant réfection et vue du vaigrage intérieur.

Le MARITE 3 La RESTAURATION

Pour refaire les couples à l'identique, on trace un gabarit. Noter que dans cette phase de la reconstruction, un couple ancien alterne avec un neuf.

Mise en place des bordés

 

Lorsque nous observions la construction de chalutiers et de cordiers au chantier Bellot de Cherbourg, la pose des bordés donnait lieu à un rituel, toujours le même. Le « Père Bellot » en personne donnait l’ordre de sortir la planche brûlante de l’étuve rudimentaire, un bac en ferraille dans lequel un tube bouché à une extrémité et rempli d’eau servait à faire bouillir le bordé dans un feu d’enfer. Pendant que l’on transportait et que l’on posait la planche, il répétait invariablement, comme un rituel : « Allez ! Ensemble, ensemble ! Doucement, doucement.»

Le MARITE 3 La RESTAURATION

Planche dans l’étuve. Chantier Bernard, à Saint-Vaast-la-Hougue

Le MARITE 3 La RESTAURATION

La pose d’un bordé implique un lissage préalable des membrures, pour qu’il s’applique parfaitement.

Le MARITE 3 La RESTAURATION

On vérifie que le bordé reposera bien à plat sur les membrures.

Le MARITE 3 La RESTAURATION

Avant le début du bordage, on note l’alternance de membrures anciennes et de neuves.

Le MARITE 3 La RESTAURATION

Comme pour les membrures, on pose un gabarit avant de couper la planche.

 

On remarquera que les bordés ne s’empilent pas. De même, l’extrémité d’un bordé n’est jamais directement au dessus d’une autre.

Le MARITE 3 La RESTAURATION

L’étrave reste solidement attachée par une sangle à l’apôtre..Mise en place de serre-joints verticaux sur un bordé avant de le clouer.

Le MARITE 3 La RESTAURATION

Avant d’enfoncer les clous. Perçage des avant-trous.

Le MARITE 3 La RESTAURATION

Ombre et lumière. Mise en place d’un bordé bâbord, avec l’extrémité encore libre.

Le MARITE 3 La RESTAURATION

Calfatage des bordés.  Photo Gérard Bourdais.

 

On voit la tresse d’étoupe, le maillet et l’outil, sorte de burin non coupant, pour insérer la tresse dans l’espace vide entre deux bordés. On recouvre ensuite le tout avec du mastic, donnant la couleur rouge à la coque. Les clous étant chassés dans le bordé, chaque tête est également recouverte du même mastic.

Le MARITE 3 La RESTAURATION

Soudure de la frette, longue pièce métallique sous la quille. Photo Gérard Bourdais.

Le MARITE 3 La RESTAURATION

Fabrication des écubiers

 

Les écubiers sont des pièces, si l’on peut appeler ainsi des ouvertures essentielles car de leur solidité dépend largement la sécurité du bateau. Les chaînes d’ancre, de trois cents mètres de long, sortant de deux caissons métalliques, coulissaient dans ces deux trous, de chaque côté de l’étrave.

Le MARITE 3 La RESTAURATION

Traçage d’un gabarit et fabrication d’une pièce d’écubier.

 

Un travail d’artisans, à la recherche de la perfection. Ce savoir-faire est, malheureusement, en voie de disparition rapide. Et accepter de se lancer dans une telle restauration, c’est, pour le Directeur du chantier naval, prendre le risque de couler non seulement son entreprise mais lui-même et sa famille avec, comme c’était rappelé au cours de la cérémonie de la bénédiction.

Le MARITE 3 La RESTAURATION

Ecubiers avec chaînes et ancres.

Fabrication de la carlingue

Le MARITE 3 La RESTAURATION

 

Fabrication de la carlingue, grosse pièce de bois du fond du bateau, fixée sur la quille, allant de l’avant soit jusqu’à un mât, soit faisant toute la longueur de celle-ci.

Le MARITE 3 La RESTAURATION

La carlingue, pièce de forme complexe.

 

On utilise également des gabarits, dont l’un est visible à droite, pour contrôler l’exactitude des formes.

Le MARITE 3 La RESTAURATION

La grue enlève l’une des deux timoneries.

Le MARITE 3 La RESTAURATION

Fabrication d’une grosse pièce, peut-être la couronne.

Le MARITE 3 La RESTAURATION

La coque montre sa forme en fuseau.

 

Le MARITE 3 La RESTAURATION

Vue de l’arrière, pont dénudé. Les serres  et le vaigrage intérieur sont visibles.

Le MARITE 3 La RESTAURATION

 

Vaigrage neuf. Le public sera accueilli dans cet espace, l’ancienne cale à poisson.

Le MARITE 3 La RESTAURATION

Coque avant bordage du franc-bord.

Le MARITE 3 La RESTAURATION

Le passage du beaupré apparaît.

 

Le MARITE 3 La RESTAURATION

Les barrots de pont, coupés plus larges que la coque, sont ajustés sur place.

Le MARITE 3 La RESTAURATION

Structure arrondie du pont. Les clous sont assez impressionnants.

Le pont n’est jamais plat, afin de pouvoir évacuer l’eau par les dalots.

Le MARITE 3 La RESTAURATION

La couronne neuve est montée sur la poupe.

Le MARITE 3 La RESTAURATION

Voûte fraîchement calfatée.

Le MARITE 3 La RESTAURATION

 

La voûte très longue donne, d’une part, de l’assise au bateau sur les vagues. D’autre part, elle diminue le déplacement (volume d’eau déplacé par la carène) de façon importante, le bateau ne faisant que trente-deux mètres de long, à la flottaison. Sur l’eau, un navire pèse l’équivalent du volume d’eau qu’il déplace. Les spécialistes cherbourgeois que nous avons consultés sont formels : cette voûte servait à gagner de la vitesse. Grâce à cette voûte, en le chargeant sur l’arrière, avec vent favorable, le bateau surfe sur les vagues et certains, comme le Sainte-Thérèse-Souvenez-Vous, gagnaient, en procédant ainsi à la voile et au moteur, deux heures de route, de la Mer d’Irlande à Cherbourg, ce qui leur permettait de vendre leur poisson les premiers. Cette voûte est typique des cordiers, en particulier, des bautiers de Barfleur. Les barques chalutières ont, en général, un arrière droit.

Le MARITE 3 La RESTAURATION

A marée basse, à Saint-Vaast.

Le MARITE 3 La RESTAURATION

Poupe ronde de la Boudeuse.

Le MARITE 3 La RESTAURATION

Etrave, avant peinture.

Le MARITE 3 La RESTAURATION

Etambot, sous la carène, avant peinture.

Le MARITE 3 La RESTAURATION

Finitions sur le pont.

Le MARITE 3 La RESTAURATION

Marité retrouve sa coque blanche.

Le MARITE 3 La RESTAURATION

27/04/2009. La cale est débarrassée, On prépare la sortie.

Marité prête pour la mise en eau de la forme.

La sortie

Le MARITE 3 La RESTAURATION

Le lendemain, à marée haute.

Le MARITE 3 La RESTAURATION

La pilotine va tracter Marité hors de la forme Napoléon.

Le MARITE 3 La RESTAURATION

Marité passe très près des caméras.

Le MARITE 3 La RESTAURATION

Marité vire vers le pont tournant, avec l’aide de la seconde pilotine.

Le MARITE 3 La RESTAURATION

Par le trou du beaupré. Photo due à l’obligeance d’un invité, à notre demande.

Le MARITE 3 La RESTAURATION

Marité et Le Vieux Copain.

Mâts et machine

Le Marité est transféré ensuite à Saint-Vaast pour la mise en place de l’arbre d’hélice, du moteur et des bas mâts. On continue, également, les aménagements intérieurs. L’une des opérations les plus longues, outre la pose des bas mâts, était la fabrication des haubans par le gréeur.

Le grand mât et celui d’artimon ont été fabriqués précédemment à Cherbourg, avant le tour de France des ports de Thalassa.

Le MARITE 3 La RESTAURATION

L’œil du maître.

 

Monsieur Auger, Directeur du Chantier Bernard, observe le montage des ferrures sur le mât en cours de fabrication. Ce montage de la ferrure sur le mât ne tolère pas le moindre millimètre de jeu.

 

Le MARITE 3 La RESTAURATION

Base de l'un des bas-mâts.

Le MARITE 3 La RESTAURATION

Embase du mât.

Le pied du mât est encastré dans une embase solidement fixée sur la quille.Conformément à la tradition, une pièce d’or a été glissée sous le grand mât.

 

Le MARITE 3 La RESTAURATION

Re-mâtage du mât d’artimon à Cherbourg, avant le tour des ports.

Le MARITE 3 La RESTAURATION

Seul, le mât de misaine sera refait à Granville.

Mât de perroquet de misaine neuf, à Granville.

Le MARITE 3 La RESTAURATION

Vue d’ensemble de la partie supérieure du mât de misaine.

Le MARITE 3 La RESTAURATION

Mât en place, lors d’une sortie en mer.

Fabrication des haubans

 

Les modifications les plus visibles sur Marité à quai à Saint-Vaast sont certainement la pose des bas-mâts et le fourrage des haubans avec du bitord avant la mise en place de ces derniers. On imagine mal à quel point enrouler des kilomètres de cette sorte de petite corde, enduite d’un produit de synthèse, destinée à protéger l’acier du câble contre l’air et le sel, peut être épuisant.

 

Le MARITE 3 La RESTAURATION

Le gréeur Samuel Lemercier serre le bitord autour du câble en acier avec un minahouet.

Le MARITE 3 La RESTAURATION

Le gréeur utilise sa mailloche pour fourrer le hauban.

Le MARITE 3 La RESTAURATION

Fabrication d’une épissure métallique.

Le MARITE 3 La RESTAURATION

Fabrication des enfléchures.

Le MARITE 3 La RESTAURATION

On ponce aussi les taquets pour le mât.

Transfert sur le platin, à Saint-Vaast

 

L’installation de l’arbre d’hélice nécessite que le bateau soit au sec. On a donc transféré la coque, avec l’aide de deux chalutiers, sur un platin de cailloux, le long de la digue, à proximité immédiate du chantier, lors d’une grande marée.

 

Le MARITE 3 La RESTAURATION

Tout le personnel du chantier est réparti à bord, sur le quai et sur la digue.

Le MARITE 3 La RESTAURATION

Le canot de la SNS transfère la remorque

Le MARITE 3 La RESTAURATION

Ce n’est certainement pas la première fois que ce Monsieur largue une amarre.

Le MARITE 3 La RESTAURATION

Le Marité est tracté dans l’axe de la passe.

Le MARITE 3 La RESTAURATION

Ils ne sont pas tous des marins professionnels, mais ce sont des connaisseurs.

 

Le MARITE 3 La RESTAURATION

Marité est au sec, à marée basse. On voit deux lignes de flottaison provisoires, la coque lège n’étant pas encore dans ses lignes.

Le MARITE 3 La RESTAURATION

Arrondi de la carène.

Les lests en béton et les mâts ont enfoncé la carène dans l’eau.

Travaux sur et dans la coque

 

Le MARITE 3 La RESTAURATION

Derniers travaux sur l’hélice.

Le MARITE 3 La RESTAURATION

On aménage aussi l’intérieur. Pose d’une cloison.

Le MARITE 3 La RESTAURATION

Les caissons à chaînes sont prêts à être installés à l’avant.

Le MARITE 3 La RESTAURATION

Soudure pour montage d’un élément de la machine.

Le MARITE 3 La RESTAURATION

Marité retrouve le fût de sa roue.

Le MARITE 3 La RESTAURATION

Prête à partir pour Granville.

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1 octobre 2019 2 01 /10 /octobre /2019 12:59

© textes et illustrations, sauf précisions contraires.

 

Ce blog n'étant pas conçu pour une étude longue, il faudrait commencer par la fin pour qu'il en respecte l'ordre logique, car il empile les articles dans l'ordre où ils sont frappés. Le premier chapitre est donc renvoyé en dernière position.

LA PECHE

EN ISLANDE, SUR LES BANCS ET AU GROENLAND

 

La morue

 

A la fin du XIXe siècle, on se rappelle le chasse-marée filant au galop des côtes de la Manche vers Paris, pour y amener la pêche la plus fraîche possible. Bien que le poisson soit une denrée très périssable, pour des raisons religieuses ou par habitude alimentaire, presque tous les Français de métropole et des Antilles consommaient de la morue. Et, pourtant, les cales frigorifiques n’existaient pas à bord des terre-neuviers.

En dehors des cales réfrigérées qui apparurent, sur les cargos, dans le dernier quart du XIXe siècle, on ne pouvait conserver le poisson qu'à l'aide des mêmes techniques que le porc tué dans les fermes, en le fumant, en le séchant ou en le salant.

Louis Lacroix précise qu’il existe plusieurs espèces de cabillauds, qui ne se mélangent pas. Les types consommés en France étaient celui des Bancs de Terre-Neuve, celui d’Islande et celui du Groenland. Cuisiné frais, ou entier sur l’étal du poissonnier, le poisson est appelé cabillaud et, salé, on consomme de la morue. L’obligation de manger maigre tous les jours poussa les moines à creuser des étangs autour des monastères et celle de faire vendredi maigre pour les simples croyants les mena à consommer des cuisses de grenouilles ou de la morue, à cause de son prix peu élevé dû à son abondance. On peut affirmer que, avant 1950, les camions frigorifiques étant encore relativement peu nombreux, seuls les Basques, les Bretons, les Normands, les gens du Nord et certains Parisiens consommaient du cabillaud, les autres de la morue salée.

Le MARITE  2  LA PECHE A LA MORUE

 

Dans l’Atlantique Nord, la morue a un dos verdâtre avec quelques points jaunes ; cette couleur s'atténue sur les flancs pour devenir presque blanche sur le ventre. C’est un poisson avec une tête volumineuse et comprimée, munie d’une énorme bouche, suffisante pour avaler un congénère. Ses yeux ronds et à fleur de tête, très écartés, paraissent un peu vitreux et ses dents sont mobiles comme celles du brochet. Il possède deux nageoires ventrales et trois nageoires dorsales. Il porte aussi deux barbillons tactiles presque translucides, placés sous la mâchoire inférieure, qui lui servent à trouver sa nourriture en fouillant les fonds de sable fin. La taille de la tête, environ un tiers du corps, est telle qu’en dessous de cinquante centimètres, la « moruette » n’était pas commercialement rentable. Dans la première moitié du XXe siècle, la taille moyenne des morues capturées variait de 0,50 m à 0,80 m pour un poids de 2 à 4 kilogrammes. Certains spécimens atteignent 1,50 m de longueur pour un poids de 50 kilogrammes au maximum, mais ils restent des exceptions.

D’après Louis Lacroix, on admet généralement que les morues doivent atteindre 0,10 m à un an, 0,20 à 2 ans, 0,30 à 3 ans, 0,50 à 4 ans, 0,70 à 5 ans, 0,90 à 6 ans. Malgré la surpêche, il existe des captures de 1,10 m qui peuvent avoir une dizaine d'années. La femelle, plus grande que le mâle, peut se reproduire à 5 ans.

La morue est un poisson migrateur, qui suit les bancs de calmars, aussi appelés encornets, mais elle ne dédaigne pas trois beaux tacauds, d’une taille suffisante pour en tirer de beaux filets, ou quelques bulots, surtout si ceux-ci ont été "généreusement" décortiqués d'un coup de talon par le pêcheur avant d’être traîtreusement piqués sur l’hameçon.

A l’époque de Marité, on ne savait pas vraiment où la morue passait l’hiver, car l’asdic n’existait pas et il ne sera utilisé, à titre encore très expérimental, pour la détection des bancs de poissons, qu’à bord de l’aviso polaire Commandant Charcot, de la Marine nationale, en 1949, pour sa première mission, avortée, vers la Terre Adélie. On supposait qu’un certain nombre de poissons quittait la région où ils se reproduisaient, mais il en restait en eaux profondes. Cependant, la longueur de la nuit et les tempêtes d’hiver ne permettaient pas aux pêcheurs français, trop loin de chez eux, de stationner sur les lieux de pêche, pour rechercher, d’une façon qui serait restée hypothétique, du poisson peut-être introuvable. Si l’on connaissait bien les habitudes de la morue pour frayer, on ne tombait pas à tout coup sur elle au bon endroit, même à la bonne saison, car, pour pondre, les morues recherchent une eau moins salée, entre 33 et 34 %, où elles se rassemblent en grand nombre. Mais, après la ponte, les morues affamées partent à la recherche de nourriture et se jettent sur tout ce qui se présente à leur portée, dans les petits fonds.

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Fumage traditionnel du poisson, par combustion lente de sciure de bois dans une barrique.

Association Les Voiles écarlates, Cherbourg.

 

Trente ans avant que Jacques Cartier explore le Saint-Laurent, en 1534, les Basques, les Bretons et les Normands pêchent déjà la morue sur les Bancs de Terre-Neuve, avec la base avancée de Saint-Pierre et Miquelon. Ce droit d’accès séculaire aux Bancs était et reste une source de conflit potentiel entre le Canada et les pêcheurs français. On se souvient de Joinville allant rappeler leurs droits à bord de la frégate La Belle Poule, avant de faire escale à New York et les derniers problèmes en date entre pêcheurs de Saint-Malo et les Canadiens ne remontent qu’aux années 1980.

Le 2 décembre 1994, un accord franco-canadien permet de répartir les ressources halieutiques et prévoit notamment un pourcentage attribué à la France sur la pêche à la morue. Il prévoit également de mettre en place une coopération régionale entre l’archipel et les Provinces canadiennes. En vertu de cet accord, des quotas sont attribués par le ministère français (en général dénommé de l’agriculture et de la pêche) aux pêcheurs français. Cet accord est arrivé à échéance en 2007. A l'heure actuelle s'ajoute un problème d'exploitation d'hydrocarbures sur le plateau continental, qui semble résolu par l'arbitrage d'un tribunal international.

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Intérieur de la barrique. Association Les Voiles écarlates, Cherbourg.

Photos prises avec l’aimable complaisance des membres de l’Association Les Voiles écarlates, Cherbourg.

 

Avant la guerre de 1914-18, douze pays fréquentaient les lieux de pêche de l’Atlantique Nord, produisant 930 000 tonnes, notre pays comptant dans ce chiffre pour 4%, soit 37 200 tonnes (détails et chiffres donnés par Louis Lacroix dans Les derniers voiliers morutiers terreneuvas, islandais, groenlandais, 1949). La Norvège, proche des lieux de pêche et pouvant produire toute l’année, arrivait en tête avec 360 000 tonnes, suivie de la Grande Bretagne avec 200 000 tonnes, puis venaient par ordre de production : l'Islande, le Canada, Terre-Neuve, la France, les Etats-Unis, l’Allemagne, le Danemark et les Féroé, la Hollande, le Portugal et la Suède. La proximité des lieux de pêche et les quantités produites permettaient aux premiers de fournir de la morue à bas prix et en grande quantité. L’apparition des chalutiers à vapeur, dans les années 30, d’abord utilisés comme chasseurs, puis se livrant à la pêche au chalut, fut la dernière cause de la disparition des armements pratiquant la pêche aux cordes.

Comme dans le porc, dans la morue, tout est bon. On utilisait les têtes et les intestins dans les casiers pour attraper les bulots, le foie était stocké dans des caisses étanches où il se décomposait, libérant l’huile qui surnageait au dessus du mélange eau et sang. On lit que l’odeur des baleiniers était insupportable mais il est permis d’imaginer que celle des cordiers n’était guère plus agréable. La morue ouverte et étêtée était immédiatement salée et stockée dans des tonneaux à Islande, dans les cales sur les Bancs et celle qui était immédiatement ramenée à terre était séchée au soleil, sur le sol ou même sur les toits, à la côte. La langue était un mets de choix. La laitance et la rogue étaient écrasés et, mélangés à de l’huile, utilisées par les pêcheurs de sardine pour attirer et maintenir les bancs. Les pêcheurs préféraient donc cet appât lorsqu’il était frais venant de Norvège, plus cher que celui des Bancs mais aussi plus efficace.

 

 

 

Dépeuplement des fonds marins et préservation de la ressource

 

En 1949, Louis Lacroix écrivait « Ce sont donc des centaines de millions de morues qui seront détruites désormais chaque année, et on se demande si, à cette cadence, les fonds de pêche ne seront pas dépeuplés dans un avenir prochain.

On constate déjà depuis une vingtaine d'années que la taille et le poids de chaque animal ramené par le filet ou les lignes sont en diminution constante. »

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Morue séchant sur les toits en Islande.

(J. B. Charcot, La mer du Groenland, 1929).

 

Les inquiétudes, nées de ce constat, ne sont donc pas récentes. On a alors pensé à des écloseries artificielles, avec des tentatives de fécondation et d’élevage qui n’ont, semble-t-il, pas abouti, pour la morue. Aujourd’hui, devant le danger de dépeuplement des fonds marins, les ressources sont étroitement surveillées, pas seulement pour la morue, et l’Europe fixe des quotas, voire interdit la capture d’une espèce pendant une période suffisamment longue pour permettre à celle-ci de se reproduire. Parmi les plus récentes de telles interdictions, on compte celle de la capture de l’anchois dans le Golfe de Gascogne et celle du thon rouge, en Méditerranée, et les quotas franco-canadiens autour de Saint-Pierre et Miquelon.

 

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Les maquereaux en cours de fumaison, avec la combustion de la sciure de bois au fond de la barrique.

(Animation par l’association Les Voiles écarlates, Cherbourg).

 

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Vieux pêcheur, sculpture de M. Lelong,

dans un morceau de l'un des anciens mâts.

 

LA PECHE AUX CORDES

 

Au début de la pêche à la morue sur les Bancs, on établissait une plate-forme entre les porte-haubans à l’extérieur du navire et les pêcheurs s’abritaient, autant que faire se pouvait, dans des tonneaux, formant une sorte de guérite. On pêchait alors à « la dandinette », avec une ligne à main, munie d’un plomb pesant entre 2,5 kg et 3 kg et de deux hameçons boëttés ou munis d'un leurre constitué par un faux poisson brillant. Les lignes étaient mises à l’eau du côté du vent afin de les empêcher de passer sous le bateau, sous l’effet de la dérive. Une fois que le plomb avait touché le fond, on remontait la ligne d’une ou deux brasses et on la dandinait pour attirer la morue, prête à se jeter sur tout ce qui se présente à elle. Ce manège durait toute la journée, interrompu uniquement à l’heure des repas. C’est ce système qui fut exclusivement utilisé sur les goélettes islandaises.

On peut imaginer la difficulté pour les pêcheurs de sentir la touche, d’une part, en raison du fond, et, d’autre part, du froid qui les obligeait à porter de grosses mitaines. Il fallait également veiller, autant que faire se pouvait, à ne pas mêler sa ligne avec celles des voisins. Si l’on peut considérer que la neige au mois d’avril est une rare exception sur les côtes de la Manche, elle est quasi quotidienne jusqu’en juillet, puis suivent le brouillard et les grosses tempêtes, avec une eau à 6 ou 7°, dans les régions où l'on pêchait la morue. Le nombre de marins ayant souffert de gelures aux mains et aux pieds parce qu’ils n’arrivaient pas réussi à rejoindre le bateau, en n’entendant pas la cloche, sur les Bancs est considérable.

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Le gréeur vient de fabriquer la corde de la cloche. Travail de matelotage.

 

Un bateau ne possède pas de cordes, à l’exception de ses lignes de fond, si c’est un cordier. Il n’y a que des bouts. (On prononce le t). Seule la cloche possède une corde.

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Boettage des hameçons avec des seiches, sur un cordier. Saint-Vaast-la-Hougue.

 

Le principe de la pêche aux cordes n'a pas fondamentalement changé, à ceci près que l'on tend celles-ci à partir du bateau et non à partir d'annexes ou de doris et que le treuil permet de les remonter dans des conditions moins pénibles. Le boëttage des hameçons se fait encore souvent à la main bien qu'il existe des machines pour le faire, en occupant une bonne partie du temps des équipages. (Le cordier cherbourgeois Précurseur fut un précurseur en cette nouvelle façon de pêcher aux cordes.)

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Ancres, gueuses et flottes, sur un cordier de Saint-Vaast la Hougue.

On aperçoit, à gauche, une "corde" soigneusement lovée et retenue par un bout capelé sur les anses.

 

 

doris portugais

doris portugais

Le plastique et le métal ont remplacé l’osier pour ces sortes de grandes lessiveuses appelées mannes, (maunes à Barfleur et Saint Vaast) du nom des grands paniers en osier auxquels elles se sont substituées. Chacune de ces maunes contient 1 200 m de corde. Les « tentis » des doris faisaient trois kilomètres deux cents de long, avec un hameçon tous les 1,80 m. Pourtant, pour les dorissiers, l’osier flottant, il présentait un seul mais sérieux avantage car ils se servaient souvent de leurs mannes comme ancre flottante, service que ce type en métal ou en plastique n’aurait pas pu leur rendre.

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Marie Madeleine, cordier du Cotentin, en carénage devant le chantier Bernard.

Ce document montre que, malgré ses mâts peu élevés, ce bateau était très toilé. Le bout-dehors est rentré. Marie-Madeleine a, depuis, fait naufrage sur une des îles Saint-Marcouf.

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Doris. La forme permettait de les empiler les uns dans les autres.

 

Les deux dorissiers partaient tendre leurs lignes, le soir, à bord de ces minuscules bateaux, qui, le lendemain matin, revenaient parfois pleins à ras bord, après avoir relevé les lignes. Cela se faisait le plus souvent à l’aviron, parfois à la voile.

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Doris empilés à bord de l'aviso Cdt Charcot, lors de sa première mission avortée vers la Terre Adélie (1949).

Détail  d'une photo prise par l'équipage, donnant une petite idée de l'état de la mer.

Reproduction numérique extraite du pré-rapport du Commandant Max Douguet, tiré à 250 exemplaires pour l’Etat-major.

 

LES BATEAUX DE LA PECHE HAUTURIERE

 

A Terre-Neuve, outre la pêche à partir de la grève, où un doris emmenait une extrémité d’un filet au large avant de décrire un arc de cercle, de préférence autour d’un banc de poisson, et de la ramener sur la grève, on pratiquait aussi la pêche côtière avec les warries. Ces bateaux, de types très divers, étaient de construction locale. La plupart, à fond plat, ressemblait à de gros doris. Armés par deux hommes, trois au maximum, ces petits bateaux avaient, en général, un rendement plus élevé que les goélettes pêchant sur les Bancs. Ils ramenaient quotidiennement leurs prises extrêmement fraîches à terre, où elles étaient traitées sur le chafaud.

A partir du XIX e siècle, on distingue deux types de pêche hauturière en bateau, celle qui se pratiquait à la dérive, du bord, « à Islande » et la pêche aux cordes tendues par des doris sur les Bancs et, plus tardivement, au Groenland. Les trois-mâts et Marité feront l’objet d’un chapitre particulier. Nous traiterons donc dans cet article, les types autres que les trois-mâts et nous laisserons de côté la pêche au chalut, même si elle fut responsable de la disparition des cordiers.

Avant 1780, les navires aux longs cours, de commerce ou de pêche, sont identiques, des engins ventrus, aux formes lourdes, avec une forte rentrée de la muraille et la plupart possède des canons. Le dessin d’un brick marchand de la fin du XVIIIe siècle, calque réduit d’un plan conservé au SHM de Cherbourg dans le Legs Bretocq, série S 2G3, suffit pour s’en convaincre. Il faut attendre les années 1830 que l’Etat vende ses bricks de guerre anciens pour trouver les premiers navires à voiles de commerce aux formes telles que nous les connaissons. Il n’y avait aucune différence entre la carène d’un brick et celle d’une goélette.

On choisissait le type de gréement selon l’usage que l’on voulait faire du bateau, et, surtout, l’aire géographique où l’on voulait l’utiliser, le brick, avec ses voiles carrées, pour les longues traversées avec des vents portants, la goélette pour louvoyer, mais aussi parce que ses voiles, dans l’axe longitudinal du bateau, étaient beaucoup plus vite opérationnelles que des voiles carrées. On pouvait aussi établir de petites voiles de cape, permettant au navire, en particulier « à Islande », de dériver tout en gardant un minimum de maniabilité.

A la fin du XIX e siècle, on trouve un certain nombre de goélettes saint-pierraises, de plus petite taille que les nôtres, entre cinquante et cent tonnes, appartenant souvent à des Canadiens français et avec un équipage composé en général du  « rebut » des matelots français, dont on n’avait pas voulu à bord de nos navires, dit clairement Louis Lacroix. Leur faible tonnage est un handicap car elles doivent rentrer fréquemment à Saint Pierre débarquer leur pêche, ce qui est une perte de temps. Les Bancs n’étant pas réservés aux pêcheurs français, on trouve non seulement de nombreux trois-mâts britanniques mais aussi des goélettes canadiennes et américaines qui donneront naissance au « blue nose » et à la célèbre compétition entre celui-ci et les goélettes américaines.

Si elles n’ont jamais pratiqué la pêche, il nous reste, cependant, grâce à la Marine nationale et à l’Ecole navale, deux magnifiques exemplaires de goélettes islandaises, l’Etoile et la Belle Poule.

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L’Etoile vient d’enrouler son hunier et s’apprête à affaler ses voiles.

Petite rade de Cherbourg, 2007.

 

                                  Longueur hors tout : 32,35 m

                                  Longueur entre perpendiculaires : 25,30 m

                                  Largeur : 7,10 m

                                  Déplacement : 214 tonneaux

                                  Tirant d’eau moyen : 2,10 m

                                  Moteur Sulzer 125 CV

                                  Vitesse au moteur : 6 nœuds

                                  Surface totale de voiles : 424,62 m2

 

Construites en chêne aux Chantiers de Normandie, les goélettes de l’Ecole Navale furent lancées en 1932. Elles sont conçues sur le modèle des goélettes islandaises qui pêchaient la morue le long des côtes d’Islande, passant environ six mois à la mer, avant de rejoindre leur port d’attache.

Les goélettes de Gravelines, Dunkerque, Granville et de Bretagne quittaient leur port en février ou début mars pour un voyage de dix à quinze jours, selon les vents et l’état de la mer, afin de se rendre vers l’Islande, sur les lieux de pêche. Les goélettes de Paimpol passaient à l’ouest de la Grande Bretagne et, souvent, de l’Irlande également, tandis que celles de Gravelines remontaient la Mer du Nord, en se servant, autant que possible, de l’abri de la côte britannique par fort vent d’ouest et de celui des pays scandinaves quand le vent soufflait de l’est.

On y pratiquait la pêche à la dérive, du bord et à proximité de la côte, sous voilure très réduite, mais prêt à mettre toute la toile si le vent forçait. Sur les goélettes en Islande, la pêche aux cordes tendues par des doris n’a jamais été pratiquée, du moins par les Français. Une fois pris à l’hameçon, le poisson ne séjournait pas dans l’eau. Il était immédiatement remonté. Le pêcheur arrachait la langue, qui était conservée, car elle était très prisée de certains amateurs et, le soir, le capitaine les comptait, afin de savoir combien de morues chacun avait pêché, la rémunération se faisant à la part. Il arrivait que le pêcheur doive de l’argent à l’armement à la fin de la saison. Rappelons que tout l'équipage pêchait, y-compris le patron, qui restait à l'arrière, tandis que tous les autres, répartis le long du bord, avançaient chaque jour d'une place vers l'avant.

A Islande, les hommes travaillaient du bord, à la dérive. Il fallait être au vent pour empêcher les lignes de passer sous le bateau. On imagine aisément à quel point il pouvait être pénible d'être exposé au vent toute la journée, à l'exception du repas de midi, à remonter une ligne d'une centaine de mètres et munie d'un plomb lourd. A cela s'ajoutait la défense d'une ou deux morues et l'obligation d'éviter de mêler sa ligne avec celle des voisins.

A l’origine, la goélette était une coque de 100 tonneaux mais on atteignit assez vite 200 tx, tonnage qui ne sera guère dépassé sur la goélette de pêche française. Le hunier et les voiles à rouleau évitant d’envoyer des hommes dans la mâture permettaient d’agir très vite lorsque l’état de la mer obligeait à quitter les lieux rapidement, la pêche se faisant très près des côtes. D’après Louis Lacroix, dans  Les derniers voiliers morutiers terreneuvas, islandais, groenlandais,  une goélette type faisait 200 tonnes, avec « une longueur totale de 35 mètres de l’étrave à l’étambot pour trois mètres de profondeur de cale, quatre mètres de tirant d’eau et sept mètres cinquante de largeur. » Les dimensions des goélettes de l’Ecole navale sont légèrement différentes : Longueur hors tout : 32,35 m, longueur entre perpendiculaires : 25,30 m, largeur : 7,10 m, déplacement : 214 tonneaux, tirant d’eau moyen : 2,10 m. Ajoutons ce que les goélettes de pêche n’avaient pas, tout l’espace disponible dans les cales étant réservé au poisson : un moteur Sulzer 125 CV donnant une vitesse de 6 nœuds. La surface totale de voiles est de 424,62 m2.

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Ketch Queen Galabriel.

 

Les goélettes de pêche embarquaient de 20 à 24 hommes, les officiers et le saleur logeaient à l’arrière, dans des « cabanes » près de la cabine du patron, tandis que les hommes, une quinzaine, logeaient à l’avant. A bord de La Belle Poule, le commandant peut surveiller la route de son bateau même quand il est couché car sa cabine, située à l’arrière, est munie d’un compas renversé.

 

 

 

On utilisa également des dundées et des bricks goélettes pour la pêche à Islande mais ils se révélèrent moins pratiques pour mettre en fuite devant le temps. C’est pourquoi ils restèrent moins nombreux que les goélettes. Par contre, on les utilisa comme chasseurs.

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La Boudeuse, au quai de Bercy, Paris.

 

L’un des concurrents en acier riveté des trois-mâts en bois. Lancé aux Pays-Bas en 1916, le bateau est d’abord un cargo jusqu’à la seconde guerre mondiale puis devient navire école suédois. Il est racheté en 2003 par Patrice Franceschi et immatriculé à Bastia. La coque porte manifestement les traces de son voyage de circumnavigation de trois ans, à la découverte de huit peuples de l’eau.  Ce type de bâtiment fut aussi utilisé comme chasseur, surtout par les étrangers, les Français étant persuadés que le fer donnerait le rouge à la morue, la rendant invendable.

UN METIER DE BAGNARDS

Le MARITE  2  LA PECHE A LA MORUE

Marité, avant bâbord, avant restauration.

 

 

On note la présence de casiers. D’un maillage beaucoup plus petit, ils servaient à attraper des bulots, (également appelés rans et « calicocos » à Cherbourg) et, sans doute, quelques homards. Un doris, appartenant en propre au capitaine, a été enlevé, en prévision des travaux. Le navire ayant été lancé sans moteur, le treuil mécanique, en partie visible à droite des casiers, est un ajout ultérieur. Il n’est pas conçu pour remonter la chaîne de trois cents mètres nécessaire au mouillage sur les Bancs. On évitait, autant que possible, d’avoir à la remonter car c’était une opération longue et fatigante et le temps qu’il fallait pour effectuer l’opération était autant de moins que l’on pouvait consacrer à la pêche. L’absence de moteur impliquait également une absence de lumière à bord et de chauffage correct. On s’éclairait avec des fanaux fumeux, dans un espace restreint, en particulier sous le gaillard d’avant.

Le MARITE  2  LA PECHE A LA MORUE

Avant tribord.

Sur les Bancs, Marité était certainement aussi bien rangée, la sécurité du bateau et de l’équipage en dépendait, mais certainement pas aussi propre.

 

Comme les autres trois-mâts terre-neuviers, Marité ne pêchait pas. Le bateau logeait l’équipage dans des conditions que nous allons voir et servait surtout comme une sorte d’entrepôt pour stocker le poisson. Nous avons voulu montrer que Marité est un clipper. On associe ce terme à une notion de vitesse. C’est exact mais insuffisant. Le clipper est un navire de commerce entièrement en bois. C’est, en fait, un cargo à voiles parfaitement adapté à ce qu’il doit transporter, et rapide, mais il s’agit d’une notion relative, car il était rapide par rapport à ses prédécesseurs. Il évoluera en clipper du thé, à carcasse métallique bordée en bois. Le terre-neuvier n’avait pas pour mission de transporter des chercheurs d’or le plus vite possible autour du Cap Horn mais de stocker, conserver et ramener le plus vite possible sa cargaison de morue salée. Si la vitesse n’avait pas d’intérêt particulier à l’aller, elle était primordiale au retour car les premiers arrivés vendaient leur pêche plus cher. On verra plus loin l’avantage, lié à cette notion de vitesse, que les pêcheurs tiraient de la voûte.

En général, le navire arrivait sur les Bancs sans « boëtte ». Pour s’en procurer, on se servait de casiers et de balances en filet, appelées « chaudrettes ou caudrettes », au fond desquelles on mettait du poisson ou de la viande salés, pour attraper un nombre considérable de bulots, puisqu’il en fallait trois par hameçon, multipliés par le nombre de doris. On ne pêchait avec cet appât qu’au printemps car la morue préfère le calmar ou encornet, et délaissait le bulot dès l’arrivée de ce dernier.

Afin de nous rendre compte de la vie à bord, faisons appel au rapport d'un médecin militaire du navire hôpital, chargé d'apporter assistance aux pêcheurs sur les Bancs, rapport cité par G. La Roërie dans le tome II de Navires et Marins (Librairie Rombaldi, Paris, 1946). Malheureusement, il ne mentionne ni le nom de l'auteur du rapport ni la date. Cette aide apportée par la Royale puis par la Marine nationale était déjà assurée par des bricks au XIXe siècle. Le commandant du Brick Beaumanoir, chargé de cette assistance, dit que les pêcheurs profitaient de la visite du navire de guerre pour échanger gratuitement du matériel usagé, emmené exprès, contre du neuf, aux frais de l'état, tout en reconnaissant les conditions de travail abominables de ces gens qui devaient parfois de l'argent à l'armement au retour.

Avant tribord.

Sur les Bancs, Marité était certainement aussi bien rangée, la sécurité du bateau et de l’équipage en dépendait, mais certainement pas aussi propre.

 

 

Le MARITE  2  LA PECHE A LA MORUE

 

Couchette à bord du Marité rénové. Photo Clément Chedmail, Patron.

 

Cette couchette n’a rien à voir avec les niches malpropres et pleines de vermine, contenant une paillasse, un matelas et des couvertures, sans draps, que le médecin décrit sous le gaillard d’avant. La chambre, à l’arrière, est réservée à l’état-major et les matelots les plus anciens, avec le saleur. Seul le capitaine dispose de sa très petite cabine, tenue dans un état de propreté qu’il qualifie de « relative ». Les récits concernant les baleiniers soulignent l’odeur qui les caractérisait à des milles à la ronde. L’odeur dans le poste ne semble guère plus agréable, car, pour faire la vaisselle, on jetait tout simplement les déchets de son assiette sous la longue table du poste. La venue du navire garde-pêche ou du navire hôpital était l’occasion de faire un minimum de nettoyage. Le médecin souligne que les bateaux américains et canadiens étaient, au contraire, parfaitement tenus, ce qui évitait aux équipages de connaître certains désagréments trop fréquents sur les navires français.

Marité, partie du poste arrière, avant restauration

Marité, partie du poste arrière, avant restauration

 

En ce qui concerne la nourriture, la morue constitue le plat de base, surtout les têtes : “ Préparée sous des formes diverses : frite ou bouillie, en ragoût, en ciboulette, elle est accompagnée de pommes de terre ou de haricots secs. Parfois, pour varier le menu, on y substitue le flétan, la raie ou le balai, sorte de grosse plie qui abonde sur les Bancs. Mais, d'une manière générale, les pêcheurs n'aiment pas à encombrer leurs doris de faux poissons qui ne leur sont pas payés, et préfèrent la monotonie de l'ordinaire à une minime perte de temps. Le jeudi, un repas de lard, et le dimanche un repas d'endaubage constituent les seules distributions de viande“  Au printemps, l’ordinaire était amélioré, si l’on peut dire, par l’arrivée de palmipèdes marins se nourrissant des déchets saturés d’huile que l’on jetait par-dessus bord. Un hameçon traîtreusement piqué dans quelques-uns permettait de “pêcher“ dadins, poules mauves, cordonniers et autres palmipèdes, dont la consommation, si on ne les dégraissait pas, provoquait invariablement, à cause de l’huile, des crises de diarrhées, assez mal venues sur un terre-neuvier et des doris. N’ayant pas de four à pain à bord, on consommait le biscuit de mer.

Le médecin insiste également sur les quantités importantes d’alcool consommées journellement à bord : “La ration normale est quatre à cinq quarts de vin rouge par jour, plus un quart de vin blanc et un boujaron d'eau-de-vie le matin. En outre, en diverses occasions, la double de vin est attribuée facilement, de telle sorte qu'en moyenne, on peut calculer qu'un pêcheur absorbe largement plus d'un litre et demi de vin par jour. Sur les navires de Fécamp, les hommes ont, en outre, du cidre à discrétion“. L’eau douce ne coule pas à flots sur les Bancs et la conserver plusieurs mois était quasiment impossible. Le problème n’existait pas sur les bateaux américains et canadiens, plus petits, qui rentraient régulièrement au port pour débarquer leur pêche.

Outre les accidents liés à la pêche, le médecin dénonce les remèdes “de bonne femme“ utilisés par les pêcheurs pour se protéger contre le chou des Bancs, aussi appelé fleur d’Islande. Il s’agissait d’une irritation des poignets due au frottement du ciré sur la peau. Au lieu d’utiliser des gants en caoutchouc comme les Américains, le pêcheur français utilisait une chaînette en cuivre ou un bracelet de cuir, qui, une fois saturé de sel et autres résidus, avait le même effet que le ciré.

D'après G. La Roërie, le rapport signale également que certains marins ne possèdent que les vêtements qu'ils portent sur le dos et qu'ils ne quittent jamais ni ciré ni bottes, même pour dormir, mais au XXe siècle, on ne pratique plus la bannette chaude, où un marin quittant son quart remplace dans la couchette celui qui lui succède, (principe qui était encore utilisé sur les sous-marins conventionnels et disparu, en France, sur les sous-marins nucléaires). Assez exceptionnels sont les bateaux français propres et bien tenus, contrairement aux navires américains et canadiens, ajoute le médecin.

 

Avant l'adoption du moteur diesel, l'équipage devait virer à bras les trois cents mètres de chaînes tendues sur l'ancre par la masse du bateau, la prise au vent, le courant et les vagues, ce qui représentait une corvée particulièrement pénible de plusieurs heures, considérées comme perdues pour la pêche. C'est pourquoi ni l'équipage, ni le capitaine, payés à la part, n'aimaient répéter cette opération trop souvent. L'adoption, très tardive, du treuil mécanique représentait donc un énorme progrès à bord, mais il était déjà trop tard pour sauver ces bateaux.

 

Le MARITE  2  LA PECHE A LA MORUE

Treuil démonté. Un outil de ce genre dès le début aurait grandement facilité le sort de l'équipage.

Le MARITE  2  LA PECHE A LA MORUE

Cuisine de Marité. (Avant restauration).

Le MARITE  2  LA PECHE A LA MORUE

Le Titanic.

La photo ne peut être que d’origine anglaise ou représenter Olympic, sister-ship de Titanic, car il faisait nuit lors de l’escale du paquebot à Cherbourg. Les morutiers et les doris ne pesaient pas bien lourd contre ces géants, lancés à toute vapeur vers les Etats-Unis.

Les accidents dus à la pêche

 

On trouve de nombreux panaris provoqués par les piqûres des arêtes ou des hameçons. Quand l'un d'eux s'enfonçait dans la main, ce qui n'était pas un accident rarissime, l'ardillon empêchant de le retirer par le chemin où il était entré, on devait scier l'œillet ou la palette et faire ressortir le reste de l'autre côté de la main qui se trouvait totalement transpercée. Avec l'hygiène à bord que mentionne ce médecin, on peut imaginer que l'infection trouvait vite sa voie dans de telles blessures.Il n'était pas exceptionnel, non plus, que le pêcheur piqué par un hameçon soit entraîné par dessus bord par la ligne et, même s'il réussissait à s'accrocher d'une main au bord, de le voir lâcher prise sous l'effet de la douleur. Les amputations d'un doigt ou d'une main étaient relativement courantes. Comme on n'embarquait pas de chirurgien, elles étaient en général pratiquées par le capitaine, sans anesthésie, mais avec beaucoup d'alcool ingurgité par le patient. Les amputations pouvaient également être provoquées par des gelures. Malheur aux canotiers qui n'arrivaient pas à rejoindre leur bord, en particulier à cause du brouillard. Errer plusieurs jours dans cette mer glaciale menait très souvent à la mort, sauf si l'on avait la chance d'être récupéré par un autre navire en pêche ou se déplaçant dans ces parages. Le bateau quittait Fécamp pour les Bancs, pour une traversée de trois semaines environ. L’absence de moteur impliquait un remorquage pour sortir du port. Les bateaux quittaient la France vers la mi-février, afin de se trouver, après une longue traversée, qui n’était pas exempte de dangers, sur les Bancs ou en Islande, au moment où la morue arrivait pour pondre Les terre-neuviers étaient confrontés non seulement aux tempêtes mais, également, aux risques de collision avec les cargos et les transatlantiques, fonçant, souvent dans le brouillard, vers l’Amérique. Le radar, qui, malheureusement, n’exclut pas les risques de collision si personne ne veille à la passerelle, n’existait pas encore et la radio non plus, sauf sur les tout derniers terre-neuviers. Le danger venait également des icebergs, qui descendent, nombreux, sur les côtes canadiennes jusque vers les Etats-Unis. La fin du Titanic, connue de tous, illustre tragiquement à quel point ces glaces dérivantes pouvaient être dangereuses. A cela s’ajoutait la perte de doris dans le brouillard. Quelques matelots étaient récupérés par d’autres bateaux mais on eut à déplorer de nombreuses disparitions. Les 44 000 morts et disparus méritent bien ce bateau souvenir.

 

Le MARITE  2  LA PECHE A LA MORUE

Marité a connu la neige sur les Bancs.

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13 août 2019 2 13 /08 /août /2019 17:14

des origines à la pomme des mâts

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© S. Fenoulière

© S. Fenoulière

Marité lors de sa sortie à Granville, après sa bénédiction

Le Marité, trésor du patrimoine maritime international

 

Lancé à Fécamp en 1923, Marité est un trois-mâts-goélette.

 

Le mât de misaine porte, maintenant, quatre voiles carrées au lieu de trois. Avant la restauration du bateau, il portait également une voile aurique, comme les autres mâts. Cette voile a été remplacée par une voile triangulaire d’étai bômée, retrouvant ainsi son premier gréement.

 

Longueur hors tout : 44,90 m

Largeur : 8 m

Longueur à la flottaison : 32 m

Tirant d’eau : 3,60 m

Poids 210 tonnes

Nombre de voiles : 15

Vitesse maximale à la voile : 13 nœuds

Surface totale des voiles : 650 m2

Moteur Isuzu 460 cv (lancé sans moteur)

 

MARITE, témoin inestimable du savoir-faire franco-américain

 

Pourquoi restaurer à grands frais « un vieux rafiot » voué à la démolition ? Le dernier voilier terre-neuvier français, aboutissement de quatre cents ans de pêche lointaine exclusivement à la voile, au large du Canada, est aussi, à l’heure actuelle, le dernier témoignage navigant connu au monde de la perfection atteinte par le navire de commerce de ce type, totalement en bois avant son élimination par les coques en fer et en acier rivetées, la machine à vapeur et surtout le moteur diesel. Mais aussi, un monument vivant, à la mémoire des 44 000 marins disparus à la grande pêche.

 

La Boudeuse

La Boudeuse

Navire à coque en acier rivetée, plus ancien que Marité. Ce type de navires a contribué à la disparition des voiliers banquais en bois.

Le XIXe, cent ans de bouleversements fondamentaux dans les transports maritimes

De la corvette corsaire française au Marité

 

Dans les histoires de la marine, on ne signale jamais de clippers français. Cela n’a rien d’étonnant dans la mesure où le terme est anglo-américain. On construisait des « long-courriers », voiliers dont les performances n’ont jamais été réellement évaluées. Mais cela ne veut pas dire que les Français ne construisaient pas de grands navires à voiles en bois dotés de performances égales aux clippers, peut-être même supérieures, grâce à un détail de construction important, même s’il est resté ignoré pratiquement jusqu’à aujourd’hui : dès 1828, sur la frégate La Belle Poule, le maître couple est situé exactement au milieu de la coque, de la pointe de la proue à l’extrémité de la poupe, et non plus sur l’avant. Or le recul du maître vers le milieu de la coque est l’une des caractéristiques essentielles des clippers purs, outre le fait qu’ils sont des voiliers marchands rapides, entièrement en bois, non armés, les clippers du thé étant un autre type, ultérieur.

Le Marité, trésor du patrimoine maritime international

Position du maître sur la coque du Marité.

 

Les navires de commerce français, en particulier les bricks et les trois-mâts en bois, ont été très peu étudiés car on leur demandait simplement de rendre les bons et loyaux services pour lesquels ils avaient été construits. Il fallut attendre Louis Lacroix pour les voir sortir un peu de l’anonymat. Pourtant, l'histoire de ces navires montre que leur renommée dépassait de loin le seul cadre de la France.

Le terme « clipper » attribué à un navire de construction française apparaît chez La Varande dans Les Augustin-Normand, à propos du Passadore, construit en 1802 par Jh.-A. Normand et vendu à un armateur américain sous le nom de Général Hamilton.

 

Le trois-mâts de commerce rapide en bois à voiles est le chant du cygne de navires voués à une disparition rapide dès leur apparition, le premier fut le clipper américain Ann McKim, lancé en 1833 seulement, car ils sont les héritiers directs des bricks, dont les premiers exemplaires ne remontent qu’aux années 1780.

Lors de la guerre d’Indépendance, en Amérique, les Français construisaient des brigantins, petits navires rapides appelés corvettes corsaires, qui ravitaillaient les insurgés américains. Les constructeurs de la Chesapeake, remarquant que ces navires tiraient leur rapidité des formes particulières et nouvelles de leur carène, conçue scientifiquement, copièrent ces formes effilées à l’avant et à l’arrière, en les améliorant encore et produisirent les célèbres « clippers de Baltimore », gréés, le plus souvent, en goélettes. Malgré tout, ces navires restaient de petite taille et, si la vitesse était un atout non négligeable pour la course et le transport de marchandises fragiles, le volume de cales restait très limité pour la marine marchande.

Pendant ce temps, les arsenaux français construisaient des bricks de guerre, d'un peu plus d'une vingtaine de mètres de long, très vite copiés par la marine marchande. Ces bricks de guerre eux-mêmes furent vendus au commerce quand l’Ingénieur Marestier produisit le brick de type Gazelle, inspiré des clippers de Baltimore, qui fut utilisé partout dans le monde, en particulier pour la traite.

Cet ingénieur fut, à la fois, celui qui permit au navire à voiles d’atteindre la perfection qu’on lui connaît et, à relativement court terme, le fossoyeur de ces bateaux, puisqu’il ramenait aussi d’Amérique tout ce qu’il fallait pour créer une marine à vapeur.

En 1829, la marine de guerre française lançait l’aviso à vapeur le Sphinx, long de 46,20 mètres, large de 8, avec une coque en bois de conception nouvelle dite en violon, afin de caser les roues. La fiabilité de cet engin, pratiquement des mêmes dimensions que les voiliers banquais, fut démontrée en 1833 lorsqu’il remorqua d’Egypte l’obélisque de Louqsor, signant la fin prochaine de la marine à voiles.

 

Remorquage de l'obélisque. Un colis encombrant et fragile. Dessin de Pierre Le Conte.

Remorquage de l'obélisque. Un colis encombrant et fragile. Dessin de Pierre Le Conte.

A la même époque, le brick de l’ingénieur Marestier présentait la particularité d’avoir une forte différence de tirant d’eau entre l’avant et l’arrière et le maître couple était placé relativement près du milieu de la coque, mais restait cependant légèrement sur l’avant. Le passage du brick au clipper s’est opéré par l’intermédiaire des grosses frégates américaines du début du XIXe siècle, qui intégraient les qualités nouvelles développées sur les clippers de Baltimore et sur les vapeurs. La position du maître couple au milieu de la coque est l’une des caractéristiques des clippers purs ou « extreme clippers » américains de 1850 - 1860, avec un rapport longueur / largeur élevé, ou des clippers du thé, autre type de navires à charpente métallique bordée en bois, comme Cutty Sark, gravement endommagé par un incendie dans sa cale sèche de Greenwich, reconnus comme des navires de commerce extrêmement rapides. Mais il s’agit d’une rapidité relative car le navire de commerce était, jusqu’à cette époque, le navire de la Compagnie des Indes et l’East-Indiaman dont la vitesse de pointe atteignait sept nœuds. Les clippers ont seulement doublé cette vitesse mais c’était un avantage considérable pour doubler le Cap Horn, en diminuant la durée du voyage de beaucoup plus du double, le navire étant beaucoup plus performant par tous les temps. Les constructeurs français de la frégate la Belle Poule, à Cherbourg, avaient dès 1828 placé son maître couple en plein milieu de la coque, donnant à ce bateau des qualités que les autres n’avaient pas et prouvant qu'un navire fin, en bois, de 64 m de long, ne se brisait pas. Cependant, sa conception en navire de guerre ne permet de considérer cette frégate que comme une ébauche du clipper.

Cette étape française, importante, mais non suffisante, vers le clipper pur a été ignorée, peut-être à cause d’une erreur commise à propos de la position de ce maître, lors d’une première étude de la maquette de la frégate, au Musée de la Marine et parce que le développement rapide des navires mixtes a occulté ce pas important en avant vers des navires à voiles de commerce rapides. Toutes les améliorations apportées aux navires de guerre passaient très vite sur les navires civils et construire un navire de commerce à trois mâts au lieu de deux ne présentait aucune difficulté particulière mais, vers 1850, ce sont les arsenaux qui prendront réciproquement ce qui se faisait de mieux dans les chantiers civils pour l'adapter aux navires de guerre. Le pas entre le brick Marestier et le trois-mâts en bois fut très vite franchi, d’autant plus que les armateurs français restèrent longtemps hostiles aux navires à coque en acier rivetée, considérant que le fer donnerait le « rouge » à la morue.

Le trois-mâts de commerce en bois à voiles, navire long et fin, conservait de sérieux avantages pour la pêche lointaine. Le navire banquais ne pêchait pas, il utilisait des doris, qu’il transportait sur son pont jusqu’aux Bancs. Il servait d’abri à l’équipage mais c’était d’abord et avant tout un entrepôt pour conserver la morue et l’amener sur les marchés. Les navires à vapeur voyaient leur cale encombrée par la ou les machines et le stockage du combustible, qui avait un coût, alors que le vent est gratuit, et l’espace dévolu à la machine pouvait être consacré au stockage du poisson. On ne gagnera vraiment beaucoup d’espace disponible dans les navires à hélice, il est inutile, pour des raisons évidentes, de parler de ceux à roues, qu’avec l’adoption du moteur diesel. On remarque que les trois-mâts banquais construits au XXe siècle, et Marité en fait partie, sont encore lancés sans moteur interne. Ce sera un ajout ultérieur, qui améliorera largement la condition de l’équipage, en donnant l’éclairage électrique, au lieu de lanternes-tempête fumeuses, et un chauffage correct des locaux.

Premier moteur diesel en usage dans la marine française.

Premier moteur diesel en usage dans la marine française.

Les ancêtres

 

Avant les tests des carènes en bassin par Chapman, en Suède, et le groupe de travail présidé par Borda, à Brest, il n'y avait guère de différence entre un navire de commerce aux longs cours et un navire de guerre. Il suffit de se rappeler les navires de la Compagnie des Indes et les East-Indiamen britanniques, qui étaient puissamment armés, afin de se protéger non seulement contre les pirates mais aussi contre les navires de guerre ou les corsaires ennemis. Les voyages étaient particulièrement longs et, même si l'on partait en période de paix, on ne pouvait jamais être certain de ce que l'on trouverait en cours de route ou au retour. Dans la première partie du XIXe siècle, les navires banquais portaient encore, en général, au moins deux canons.

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Göteborg

 

Réplique suédoise d’un navire de la Compagnie des Indes orientales suédoise, coulé en 1745, à son retour à Göteborg. Le navire fait deux mètres de plus, hors tout, que Marité. Noter qu’il a une contre-civadière et une civadière.

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Avant le départ.

 

Eau-forte, par A. Brouet, 1er état, 15/15. Col. particulière. Cherbourg.

 

De la corvette corsaire française de 1780 au clipper

 

Le progrès technique dans la marine fut inséparable de celui des sciences et d’une certaine mondialisation du commerce, grâce aux vastes empires coloniaux qui, au XIXe siècle, alimentaient la révolution industrielle des puissances européennes. Il y eut, certes des bruits de guerre, et même des guerres, mais ce développement économique rapide de la Grande Bretagne, celui de la France, à un moindre niveau, et la croissance rapide des Etats-Unis s'accordaient mal de l'état de guerre quasi-permanent jusqu’en 1815. Il devenait important d’aller aussi vite que possible d’un continent à l’autre. Le navire qui permit ce développement fut certainement le brick, avec sa variante le brick-goélette, et la goélette car il n’y avait pas de différence entre la coque de la goélette et celle du brick. L’exploitation de l’homme par l’homme, sous la forme de l'esclavage, a favorisé le brick, sa rapidité dans les alizés lui permettant de déjouer la surveillance des navires de guerre chargés de réprimer la traite, après son interdiction.

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Projet de « corvette corsaire mâtée en brigantin », époque révolutionnaire.

Calque réduit d’après un plan original conservé dans le Legs Bretocq, série S 2G3, SHM Cherbourg. (Copie S. F.)

 

La corvette corsaire mâtée en brigantin,
précurseur du brick et du clipper de Baltimore

 

Les bricks et les goélettes se développèrent en même temps, des deux côtés de l’Atlantique. Ils furent, cependant, tous inspirés par les corvettes corsaires françaises qui forcèrent le blocus des colonies américaines par la Grande Bretagne, lors de la Guerre d’Indépendance (1775-1783). Un projet de corvette corsaire mâtée en brigantin fait partie de la collection de plans originaux du « Legs Bretocq », conservé au Service Historique de la Marine, rue de l’Abbaye, à Cherbourg.  Bretocq fut le premier Directeur de l’arsenal et conserva tous les plans originaux des navires auxquels il eut à faire, de près ou de loin, durant toute sa carrière, documents signés par les constructeurs et approuvés par les ministres.

 

 

 

Le plan représenté ci-dessus est un projet, dessiné au début de la Révolution, de bâtiment destiné avant tout à être assez rapide pour traverser l’Atlantique et pouvoir prendre à l’abordage les navires marchands ennemis, en particulier les anglais. Certains de ces bâtiments réussirent à capturer des bateaux beaucoup plus gros qu’eux, prises qui les remorquaient alors pour rentrer au port, mais cela mena aussi à exagérer leur capacité à remplacer de gros navires.

Ce type de bateau a joué un rôle important en Amérique, pendant la Guerre d’Indépendance, car il a non seulement servi à déjouer le blocus des côtes américaines en ravitaillant les Insurgés, mais il a surtout servi de modèle aux constructeurs de navires de la Chesapeake, qui, en l’améliorant, en firent les célèbres clippers de Baltimore, comme Chasseur, dont Pride of Baltimore II est une réplique.

Pendant la Révolution, si les navires français ne pouvaient pas quitter leur port, les bateaux étrangers, et en particulier les navires de commerce américains, ne pouvaient pas y pénétrer non plus. Ceci, joint aux contrôles pointilleux et vexatoires exercés à bord des bâtiments américains par les officiers britanniques recherchant les déserteurs anglais, fut une des causes de la guerre de 1812, entre les Etats-Unis et la Grande Bretagne, où les goélettes mises au point par les constructeurs de la Chesapeake Bay et les frégates s’illustrèrent.

 

 

Ce sont les célèbres clippers de Baltimore, inspirés de ces corvettes corsaires françaises, qui serviront de modèle à Marestier pour le plan type remarquable de la Gazelle, brick de guerre qui fut très copié par presque toutes les marines marchandes et de guerre pour ses qualités marines et sa vitesse. Ce type devint, en particulier, le navire de la traite. Il y a donc eu une étroite relation entre les navires américains et les français, les uns ayant fortement influencé les autres, dans les deux sens.

Mais avant d’examiner de plus près les célèbres goélettes américaines, arrêtons-nous sur ce type particulier de corvette qui a retenu l’attention de Bretocq. La forme du maître couple, en verre à vin, est très différente de celle, traditionnelle, des brigantins et autres navires de charge.

 

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Brigantin, à mâture à pible, entrant dans le chenal de l’avant-port de Cherbourg, avec une mer agitée peu vraisemblable. Le canot, armé par deux hommes, est curieusement posé sur cette houle. A gauche du phare se trouve l’ancienne plage, où sera construite la nouvelle gare maritime, devenue depuis la Cité de la mer, dans les années 1930.

Carte postale du début du XX e siècle, d’après une gravure ancienne.

Col. particulière.

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Canot à clins de Pride of Baltimore II.

 

Le canot a gardé le nom français de son modèle du début du XIXème siècle. Noter l’absence de bossoirs pour mettre le canot à l’eau. L’équipage doit le soulever à la force des bras.

 

La corvette, conçue en pieds, faisait environ 22 mètres de long sur 5,80 mètres de large, avec des lignes d’eau nettement plus fines que sur les types précédents. C’est une application des recherches relatées par de Lironcourt, dans son dictionnaire et menées à Toulon et à Brest, sous la direction de Borda, ainsi qu'en Suède, par Chapman, pour rendre la mâture et les carènes plus efficaces.

Cependant, sur ce navire qui devait transporter soit des canons et des munitions, soit des marchandises, souvent les deux, les lignes, quoi que beaucoup plus fines que celles des brigantins, restent un compromis entre recherche de la vitesse et volume de cales satisfaisant. Par contre, comme Chapman le préconisait, il y a la volonté de créer une sorte de plan de dérive, afin de laisser les filets d’eau frapper librement le safran. C’est cet élément que les constructeurs de Baltimore ont remarqué et poussé au maximum sur leurs navires. La différence de tirant d'eau entre l'avant et l'arrière n'est pas encore très prononcée. Il faut noter également la tonture assez forte qui subsiste et les quatorze caronades d’une livre.

L'idée de créer un navire de guerre à deux mâts est née en France, à Toulon, avant 1771, et il s’agissait d’une corvette mâtée en brigantin. Dans  INSTRUCTION ELEMENTAIRE ET RAISONNEE SUR LA CONSTRUCTION-PRATIQUE DES VAISSEAUX en forme de dictionnaire, par de Duranti de Lironcourt (Paris, chez J.B.G. Musier Fils, Libraire, Ed. originale), à l'article "Mâture et envergure des vaisseaux", on trouve :

"la plupart des vaisseaux françois qui naviguent dans les Echelles du levant ont aussi une mâture particulière, qu'on pourrait peut-être, moyennant quelques changements, adapter avec succès aux bâtiments les plus légers que le Roi a dans ses trois ports. L'épreuve très satisfaisante que le département de Toulon fait depuis plusieurs années de cette mâture qu'on nomme pible, pourrait engager à en faire l'essai dans les ports de l'océan. Toute la mâture du grand mât, ainsi que celle du mât de misaine, sont d'un seul jet, quoique souvent composé de plusieurs pieces (sic). Ces mâts sont d'une grande souplesse et sont capables de grands efforts ; ils sont soutenus solidement à chaque encapelure et sont fort aisés à veiller et à ménager. D'ailleurs ils donnent une grande facilité pour orienter les voiles au plus près du vent, la manœuvre en est plus prompte et demande beaucoup moins de bras."

Etape intermédiaire entre le brigantin et le brick
« BRIC MARCHAND DE 180 TONNEAUX »

« BRIC MARCHAND DE 180 TONNEAUX »

Calque réduit d’après un plan original conservé dans le Legs Bretocq,

série S 2G3, SHM Cherbourg. (Copie S. F.)

La forme du maître couple, avec sa rentrée, est très proche de celle de Göteborg.

 

Ce bâtiment était un navire de commerce. Il n’est pas étonnant de voir les bricks coexister avec des brigantins plus anciens et les navires de charge posséder un certain nombre de caractères considérés comme obsolètes. Ce bateau est manifestement un compromis entre les anciens brigantins, avec la forme ventrue démodée de sa carène, son maître couple en U à la base et sa forte rentrée dans le haut, et les nouveaux bricks qui possèdent, d’une part, une mâture à clés et, d’autre part, des lignes d’eau pincées à l’avant et à l’arrière, cherchant à créer, de façon encore très limitée sur ce modèle, un plan de dérive. On note également une tonture importante, qui n’existe plus sur les bricks et goélettes de guerre. Ce bateau, conçu en pieds de France, mesurait 22,74 m entre perpendiculaires et 6,50 m de large.Sur ce modèle de navire, on ne recherchait pas tant la vitesse qu’un volume de cales suffisant pour rentabiliser le bateau, plus gourmand en hommes d’équipage que la goélette, à cause des voiles carrées. Le document pris sur Shabab Oman, du même type que le Marité, en donne une idée.

On notera que Marité fait cent quarante-cinq pieds hors tout de long et environ vingt-cinq pieds de large. Les navires de pêche, construits dans les chantiers civils, furent très longtemps conçus, en toute illégalité, puisque l’usage du pied était interdit, en théorie depuis le premier quart du XIXe siècle, en cette ancienne mesure, qui avait servi pendant des siècles. De plus, dans ces chantiers locaux, on construisait selon des gabarits et non pas sur plans. La façon dont Marité est restaurée, à partir de gabarits tracés sur les anciennes membrures, n’est pas sans rappeler les méthodes encore utilisées au XIXe pour les constructions neuves.

C'est, croyons-nous savoir, l'usage de l'ordinateur qui a mis fin au traçage des pièces sur le sol et à la construction d'une maquette en bois à l'échelle 1 pour la construction des sous-marins nucléaires lanceurs d'engins, ( SNLE ), Le Redoutable étant le dernier construit à partir d'une telle maquette.

Dans la première partie du XIXe siècle, les chantiers navals civils produisaient des bateaux sans plans car les ouvriers, illettrés, ne savaient pas les lire. On utilisait donc des gabarits pour tracer et découper les pièces, ce qui ne pouvait que freiner l’évolution. Dans les arsenaux de l’Etat, les ingénieurs furent priés, par un décret de 1819, de concevoir définitivement les bâtiments en mètres et non plus en pieds. Mais les seuls ouvriers ayant une formation scolaire étaient les élèves sculpteurs, formés dans les écoles qui devinrent les Centres de Formation Technique, disparus depuis l’an 2000. Si l’adoption du système métrique ne posait pas de problèmes particuliers aux ingénieurs, l’illettrisme des ouvriers a freiné son application dans les constructions navales de l’Etat et surtout dans les chantiers privés. D’autre part, les bois travaillant sur le chantier, on ne connaissait les dimensions exactes d’un navire, même très tardivement au cours du XIXe siècle, que lorsqu’il était lancé, ce qui permettait, probablement, de tricher un peu avec le nouveau système.

 

 

Le Marité, trésor du patrimoine maritime international

Poupe de Göteborg

 

La forme, avec sa rentrée, est comparable à celle du brick marchand.

 

Influences franco-américaines mutuelles sur les bricks et goélettes
Le Marité, trésor du patrimoine maritime international

Pride of Baltimore II, réplique de Chasseur, dans la darse transatlantique de Cherbourg.

 

 

Cette superbe goélette étant la copie d’un corsaire, portant le nom français Chasseur, on remarque que les sabords sont invisibles, ce qui lui donne l’aspect extérieur d’un paisible navire de commerce. Elle est à couple de Eagle, le navire école des U. S. Coastguards.

Ce bateau  n’est pas un navire école. Il a été construit pour représenter la ville de Baltimore aux Etats-Unis et à l’étranger. Après le naufrage de Pride of Baltimore, il a été décidé de reconstruire un bateau un peu différent du premier, dans la mesure où les plans intégraient des moteurs, le confort de l’équipage et tout le matériel de navigation et de sécurité modernes. Sur le premier exemplaire, un seul moteur avait été tardivement monté, les câbles étaient en chanvre… C’était une copie fidèle, peut-être un peu trop, de Chasseur.

 

Le Marité, trésor du patrimoine maritime international

Autre vue de Pride of Baltimore II, à couple de Eagle.

A partir de la Guerre d’Indépendance, 1775-1783, l’évolution du brick, de la frégate et du clipper pur est étroitement liée entre la France, la Grande Bretagne et les Etats-Unis. Pendant que les Britanniques et les Français faisaient évoluer la corvette corsaire vers le brick, les constructeurs de navires de la baie de Chesapeake, aux Etats-Unis, développaient leur propre modèle, le clipper de Baltimore, souvent gréé en goélette, issu du même modèle français. Très tôt, la jeune nation a songé à protéger ses vastes côtes qui s’étendent sur deux façades océaniques. Leur immensité et le manque de moyens financiers ne permettant pas de réaliser immédiatement une flotte de vaisseaux, on assistera à la création de petits modèles, dont certains, notamment les clippers de Baltimore, seront particulièrement performants et de frégates.

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Plan partiel de la goélette de guerre Vixen, construite à Fells Point par William Price en 1803. Extrait de Guerres contre les Barbaresques, Personnel et navires, 1801-1807. U.S. Government Printing Office, Washington, DC. Elle possède encore des herpes, qui disparaîtront sur les modèles de la Chesapeake.

Les lignes de ce navire de guerre sont manifestement très proches de celles de notre corvette corsaire. Elles ne sont pas encore pincées à l’avant. Par contre, le bateau n’a pratiquement plus de tonture. Vixen, présenté ici, est un navire de guerre dont les huit sabords sont clairement visibles, alors qu’ils sont cachés sur les corsaires comme Chasseur. Noter, également, que les mâts ne sont pas aussi penchés vers l’arrière que sur les goélettes de la Chesapeake Bay, à mâts autoporteurs. Si ce bâtiment a encore une poulaine, parce qu’ils étaient très pragmatiques et parce que le type entièrement nouveau des navires à vapeur n’en avait pas, les Américains de la Chesapeake Bay ont éliminé, presque dès le départ, cette sorte d’appendice qui alourdissait l’avant sans autre intérêt que d’être très coûteux et de servir de toilettes à l’équipage. Il faudra attendre les bricks sur plan Marestier pour voir la poulaine disparaître des bricks de guerre anglais et français.

 

En 1794, le Congrès autorisa la construction de six frégates, parmi lesquelles Constitution et President.En mai 1798, Benjamin Stoddert fut nommé Secrétaire de la Marine par John Adams. A la fin de l’année, il proposa au Congrès les objectifs navals à atteindre pour assurer la protection efficace des côtes américaines. Le Congrès autorisa alors la construction de six vaisseaux de 74 et de six sloops de guerre, en fait, de petites corvettes. Seuls, les sloops furent construits mais les six vaisseaux, conçus sur plans et censés mesurer une soixantaine de mètres de long, une quinzaine de mètres au bau et armés de canons de 32 livres, ne furent pas réalisés pour des raisons budgétaires.  « S’ils avaient été construits, il y a tout lieu de croire qu’ils n’auraient rien eu à envier aux meilleurs vaisseaux européens et auraient peut-être permis d’éviter la guerre de 1812 contre la Grande Bretagne » (d’après American Ships of the Line, Naval History Division, Navy Department, Washington, D.C. 1969).

De plus, à partir de 1805, après une paix relative conclue avec les Barbaresques, Jefferson décida, par manque de moyens financiers et peut-être influencé par la théorie française de « poussière navale » soutenue par Forfait, la construction d’une centaine de petites canonnières, peu aptes à empêcher les Anglais d’arrêter les navires marchands américains accusés de soutenir Napoléon et de leur faire subir avec arrogance toutes sortes de vexations, en contrôlant, au nom du droit de visite international, que des déserteurs britanniques n’étaient pas à bord de ces bateaux et en prenant parfois de force de véritables Américains. C’est la guerre de 1812 qui prouvera toutes les qualités des célèbres frégates Constellation et Constitution, d’où seront extrapolées les grosses frégates anglaises et françaises du premier quart du XIXe siècle.

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Avisos américains.

Communiqué par la Smithsonian Institution, Department of Transports, Washington, USA.

 

Et c’est aussi cette guerre qui prouva les qualités exceptionnelles des clippers de Baltimore. Vitesse et maniabilité étaient les qualités recherchées pour ces navires, parfois des pilotes, conçus pour naviguer théoriquement le long des côtes, mais les goélettes se révéleront autant performantes, sinon plus, que les bricks pour traverser l’océan.

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Goélette pilote de Virginie.

Origine inconnue. Document provenant de la bibliothèque de Pride of Baltimore II,

aimablement communiqué par l’équipage.

Contrairement à Vixen, les mâts autoporteurs sont très inclinés sur l’arrière et l'on notera l’évolution des lignes : elles s’affinent en devenant pincées à l’avant et à l’arrière, avec une forte différence de tirant d’eau. Le maître couple est beaucoup plus aplati que sur la corvette corsaire française, et en forme de coupe à champagne, pour la recherche de la vitesse. Notons que, quarante ans plus tard, les « extreme clippers », étudiés également pour la vitesse, seront des bateaux longs et étroits, avec un rapport L / l élevé, mais le maître couple reviendra en forme de verre à vin sans rentrée, modèle le plus rapide pour un volume de cales satisfaisant.

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Chasseur, goélette américaine de la Chesapeake Bay, 1812, origine du document inconnue.

Noter les mâts très inclinés sur l’arrière. Copie provenant de la bibliothèque de la goélette, aimablement communiquée par l’équipage de Pride of Baltimore II.

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Goélette Little Mary.

Cette goélette inspirera les goélettes et les bricks Marestier. D’après série S, 2G3.

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Goélette brestoise La Recouvrance, réplique d’un navire de guerre de 1813.

Contrairement au corsaire américain Pride of Baltimore II, le navire de guerre français montre ses sabords.

 

LES BRICKS

 

Le brick fut incontestablement le navire de la Révolution et la bonne à tout faire de la révolution industrielle. L'idée de créer un navire de guerre à deux mâts est née en France, à Toulon, avant 1771, et il s’agissait d’une corvette mâtée en brigantin. Nous avons vu que le brick, français ou anglais, est issu des travaux du groupe du Chevalier de Borda, à Brest.

 

 

Trouver un brick avant 1771 est donc impossible. Notons que de Lironcourt parle de «vaisseaux» à deux mâts seulement, ce qui implique des bâtiments de guerre mesurant un peu plus de vingt mètres de long, mais qui ne sont pas assez puissants pour entrer dans la ligne. Le fait de demander "moins de bras" deviendra capital vingt ans plus tard, pendant la Révolution et l’Empire, où l’argent fera défaut et de nombreux marins français croupiront sur les pontons britanniques. Les « corvettes corsaires » avec leur mâture de brigantin sont les premières applications de ces recommandations. Pourtant, la mâture à pible présente un inconvénient majeur : lorsqu’un mât est brisé, on ne dispose pas toujours d’un arbre d’une taille suffisante pour le remplacer et on ne peut embarquer dans la drome un mât de rechange d’une telle dimension et d’un seul jet. Ceci favorisera le passage à la mâture à clefs, caractéristique du brick.

 

Pendant la Révolution et l’Empire, à cause de la disparition des cadres de la marine émigrés, du manque d’argent et les côtes françaises étant complètement bloquées par la marine anglaise, seuls de petits bâtiments rapides, capables de se cacher dans les baies, pouvaient tromper la vigilance de l’ennemi. Cela explique le développement des corvettes corsaires puis des bricks.

On passe très rapidement de l’idée de créer un vaisseau léger mâté en brigantin, exprimée en 1871 par de Lironcourt, au brick et à sa sœur la goélette moderne. Rappelons que la seule différence entre ces deux bâtiments est leur gréement et non pas leur carène. Sur une goélette, le mât principal ou grand mât, portant le plus de toile, est situé à l’arrière. On se demande souvent pourquoi les mâts sont si inclinés sur les répliques modernes américaine, Pride of Baltimore II et française La Recouvrance. Ce sont des mâts autoporteurs, tenus en place sans haubans par leur propre masse, ce qui permet d’ouvrir plus largement les voiles. A cette époque, on privilégiait le brick comme gréement pour les vastes espaces océaniques, ses voiles carrées étant performantes dans les vents portants, et la goélette pour les mers étroites comme la Manche ou difficiles, à cause des bancs de sable, comme la Mer du Nord ou les côtes américaines.

Pour la pêche sur les bancs ou la chasse à la baleine, les Américains du Nord utilisaient surtout des goélettes, dont les célèbres « blue nose » canadiens. L'absence de trois-mâts américains pour la pêche à la morue et la construction plus précoce qu'en France de navires à coque en fer expliquent la disparition assez brutale des clippers aux Etats-Unis, lorsque le train a traversé tout le territoire, d'Est en Ouest.

 

Le premier brick anglais fut commandé à un chantier par l'Amirauté en 1779 (communiqué par le National Maritime Museum de Greenwich). Dans les Augustin Normand, La Varende insiste sur le fait qu'il est impossible de trouver un véritable brick avant 1790, sans autres précisions et Monsieur Boudriot, dans la monographie du Cygne, situe cette date en 1780, à Saint-Malo et à Bayonne. Nous ne savons comment expliquer ces différences de dates. Nous n'avons pas trouvé, dans les nombreux documents conservés à Cherbourg, malgré leur origine diverse, de navire de guerre appelé "BRIC" avant le début du XIXème siècle (1804).

Le brick fut d’abord un navire de guerre mais ses qualités nautiques le firent vite copier dans la marine de commerce. Tous les bricks ont deux mâts à clés. Sur un navire de guerre, qui risque de se faire démâter, il est plus difficile de regréer une mâture à pible d’un seul jet qu’un mât à clefs. Chez les militaires, les bricks, malgré ces deux mâts seulement, sont classés parmi les vaisseaux, dont ils occupent le dernier rang, avec les corvettes. Cette origine militaire explique peut-être la différence d’appellation pour un même navire : les officiers et ingénieurs militaires ainsi que les historiens appelaient ce navire bricq ou bric. Voir Forfait parler de bric et de brigantin n’a rien d’étonnant puisque cela correspond à la période où ce type nouveau est apparu, muni, à l’origine, d’une mâture de brigantin et les deux types de gréements ont dû coexister un certain temps. Par contre, les capitaines marchands, souvent sortis du rang, n’utilisent que brig pour ce qui reste un gros brigantin à leurs yeux. Dans les chantiers navals civils, l’ouvrier construisait le bateau de mémoire, avec ses gabarits. On était donc certainement plus conservateur chez les civils que chez les militaires, plus conscients des nouveautés technologiques. On n’abandonnera réellement le pied qu’avec les navires à vapeur à coque en acier, parce qu’ils étaient de conception entièrement nouvelle et la marine de guerre empruntera alors parfois des solutions aux chantiers civils.

On oublie assez facilement que les bricks sont des bateaux relativement gros, puisque d'après les listes fournies par le Capitaine Lacroix, généralement considéré comme bien informé, et qui a connu certains de ces navires doués d’une longévité remarquable, le tonnage moyen des bricks est de 159 tonneaux en 1824-1826 pour les bricks négriers et de 180 tonneaux pour tous les autres types, dans la seconde moitié du XIXème siècle. Il est vrai que dans "Les Derniers Négriers. Voyages de bois d'ébène", le célèbre auteur cite des bricks de 105 tonneaux. On peut encore y lire que certains armaient des avirons dans les calmes et l’on faisait parfois nager (ramer) les esclaves, étroitement surveillés, pour sortir plus rapidement du pot au noir; mais, pour des raisons de longueur d'avirons, cela n'était possible, et à titre exceptionnel, que sur les petits modèles.

Que les bateaux soient français, anglais ou américains, on constate la même volonté de réduire le déplacement au maximum. A cette époque, la forme d'un verre à vin, puis d’une coupe à champagne, est caractéristique de la recherche de la vitesse, ce qui est une nouveauté dans la marine. La notion de rapidité était apparue à Suffren dans la guerre des Indes, pendant laquelle il avait pu apprécier l'avantage stratégique que les carènes doublées en cuivre procurent par rapport aux navires mailletés, beaucoup plus lents parce qu’ils étaient munis de clous enfoncés dans la carène pour la protéger contre les tarets. La vitesse, l’économie financière et en hommes ont aussi joué un rôle capital dans le choix de créer d’abord, avec succès, une marine avec des grosses frégates aux Etats-Unis. On peut s’étonner du retard pris en France pour les navires à vapeur. Si Napoléon a refusé l'idée proposée par Fulton de faire remorquer la flottille de Boulogne par des navires à vapeur, n'est-ce pas parce que, dans la meilleure hypothèse, l'engin ne pourrait dépasser trois nœuds, donnant ainsi aux frégates anglaises à voiles, beaucoup plus rapides, la possibilité de tenir les convois à leur merci? Il manquait, également, en France, les ateliers et les mécaniciens pour construire les machines.

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Brick français, premières années 1800 avec toutes ses voiles, bonnettes et voiles d’étai.

Calque réduit, d’après Série S 2G3, SHM Cherbourg. (Copie S. F.)

Il a une contre-civadière, qui ne sera plus visible sur les modèles de 1809-1810. Même quand on ne gréera plus la civadière, on gardera la vergue sur certains bateaux, car elle permet d’assurer le beaupré. On doit noter la forte différence de tirant d’eau entre l’avant et l’arrière, le pont est entouré d’un filet et il porte toutes ses voiles d’étai et bonnettes. Le beaupré s’abaissera vers l’horizontale, en s’arrêtant à un angle d’environ 15 degrés. D’après « l’Amiral », son grand-père, les jeunes commandants faisaient porter à leurs bricks, dit La Varende, autant de toile qu’à une frégate. On note, également, les herpes de la poulaine.

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Comparaison entre une goélette américaine et un brick français.

 

Le pied français était légèrement différent du pied britannique, mais cette légère différence, ajoutée à celle, éventuelle, de densité des bois, peut expliquer, en partie, pourquoi les Anglais n’ont jamais réussi à copier entièrement les navires français qu’ils capturaient. A cela s’ajoute que leurs navires étaient un peu plus courts que les français, or, plus le rapport L / l est élevé, plus le bateau est rapide. Avec ses dix sabords de chaque côté, le brick n’était pas assez puissant pour entrer dans la ligne, mais c’était suffisant pour accomplir les tâches de police qui lui étaient dévolues et aussi, exceptionnellement, pour sortir vainqueur d’un combat avec un ennemi plus puissant mais moins maniable. Le tort de Forfait, avec sa théorie de poussière navale, c’est d’avoir fait de quelques exceptions une règle.

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Brick 1812-1815.

Calques, d’après les originaux du SHM Cherbourg. (Copies S. F.)

 

On note la disparition des herpes et du filet. La poulaine est fermée et forme cuillère quand le navire plonge dans la vague. Un autre élément caractéristique est la disparition de la contre-civadière. Les guerres de Napoléon coûtent manifestement cher, l’argent manque car le navire est moins puissamment armé que ses prédécesseurs : il n’a que six sabords. La théorie de la poussière navale a échoué et, pourtant, on n’abandonne pas la construction de ces petits navires de guerre car on n’a plus les moyens de construire des navires de ligne. C’est une attitude semblable à celle des Etats-Unis.

Le type de brick ci-dessous, avec sa poulaine en pointillé, sera celui de guerre jusqu’en 1830 et, débarrassé de cette dernière, il sera navire de commerce lorsque le gouvernement vendra ces modèles devenus obsolètes à cause de l’apparition du brick Marestier. On observe que le maître-couple se rapproche de la forme d’un verre à vin, ce qui donne au bâtiment un volume de cales relativement intéressant.

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Pirogue, à bord de Esmeralda.

 

A bord de Kate Cory, brick baleinier américain de Westport, 1856, les baleinières, très proches de ce modèle, mesuraient un tiers de la longueur du navire.

 

 

Gazelle, dont une maquette et le plan type sont présentés ci-dessous, est inspirée de la goélette Marestier. Les lignes du bâtiment sont fines. La différence de tirant d’eau entre l’avant et l’arrière est très accentuée. Le maître recule vers le milieu de la coque, sans l’atteindre, mais cela en fait le premier pas vers le clipper pur, ou « extreme clipper ». Sa forme est beaucoup plus évasée que sur les modèles précédents. Au lieu d’un verre à vin, on a, maintenant, une coupe à champagne.

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Maquette de la Gazelle,

Sur plan type Marestier, 1830, montrant la finesse de la carène et la forte différence de tirant d’eau entre l’avant et l’arrière. Musée de la Marine, Toulon. Photo S. Fenoulière.

 

               Longueur du pont :                                                 30 m           

                    Longueur de râblure à râblure, à la flottaison :                 27, 90 m

Largeur au maître couple :                                   8 m

      Tirant d’eau à l’avant :                                           2, 90 m

      Tirant d’eau à l’arrière :                                         4, 20 m

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Gazelle, sur le modèle duquel sera construit le Laurier,

Calque réduit d’après le plan type conservé au S. H. M. Cherbourg.

 

Ce type de brick, à cause de ses qualités marines, fut à la fois le navire de la traite clandestine et celui de la lutte contre les fraudeurs. Par rapport au plan de la goélette, les mâts sont moins inclinés sur l’arrière et le maître, moins évasé, se rapproche de la forme du verre à vin.

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Le Génie, l’un des derniers modèles de brick en bois de la marine de guerre française.

D’après le plan conservé au S. H. M. Cherbourg.

                La position du maître-couple sur l’avant déforme la coque en sabot, ce qui explique les faibles performances en ce qui concerne la vitesse de tels bâtiments, qui étaient destinés à la police des ports ou à l'assistance des pêcheurs sur les Bancs.

Le fer et la vapeur remplaceront ces bricks aux formes lourdes, une « lourde caisse aux larges épaules » disait B. Lissignol, qui représentent un retour en arrière. Ces bricks servaient à la police des rades et surtout de garde-pêche sur les Bancs. On embarquait un certain nombre de spécialistes capables de réparer le matériel des pêcheurs, aux frais de l’Etat, ce qui explique peut-être ces formes. Le commandant du brick Beaumanoir raconte, tout en refusant de les condamner, que les pêcheurs en usaient et abusaient, embarquant, parfois volontairement, du matériel usé qu’ils faisaient remplacer gratuitement ou presque par le garde-pêche. Il reconnaissait qu’ils faisaient un métier particulièrement dur et dangereux, qui pouvait ne rien leur rapporter, vu qu’ils étaient payés à la part.

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 Le brigantin moderne T. S. Royalist. (1)

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Maquette représentant un brick à arrière rond, sous voiles, vers 1850. Musée de la Marine, Toulon. Photo : S. Fenoulière

 

LES FREGATES

 

Le passage d’un navire de commerce, relativement petit à deux mâts, à “l’extreme clipper“, s'effectue encore par l'intermédiaire d'un navire de guerre, la frégate. Tout comme les bricks, qui furent, au départ, des navires militaires, les frégates, navires en bois du premier tiers du XIXe siècle, à trois mâts et de longueur comparable à celle des clippers, représentent un stade important dans l'évolution du navire de commerce.

Aux Etats-Unis, pionniers des navires à vapeur, la « frontière », entre l’Est colonisé et le « Wild West » se trouve, pour un certain temps, sur le Mississipi, énorme fleuve navigable qui est le poumon économique du Middle West. Selon Mark Twain, c’est "la vapeur", (le bateau), qui réveille la ville car c'est pratiquement le seul lien avec l’extérieur. Cette forme de propulsion nouvelle oblige à concevoir des solutions techniques entièrement différentes pour les coques. Si la vapeur permettait le peuplement du Middle West, techniquement, elle n'était pas performante sur un navire de guerre parce que les chaudières ne pouvaient produire qu'une pression égale à celle d'une cocote minute. Or vitesse et puissance d'armement sont indispensables sur un navire de guerre.

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Copie parisienne de steamboat.

 

Curieusement, la France qui est à la pointe de la recherche de la vitesse sur les bricks est incapable de construire les machines de ses propres navires à vapeur. Ce sont des entreprises anglaises qui fournissent non seulement les machines mais aussi les mécaniciens des navires mixtes, avec tous les problèmes que cela peut représenter en cas de conflit. On construit des coques en bois solides dites en violon pour loger les roues mais les Français continuent à considérer, contre toute évidence, qu’une coque en bois d’une telle longueur pour un voilier de commerce briserait le navire !

Le retard pris par la France apparaît clairement car les Américains n’hésitent pas à intégrer toutes les nouveautés des coques des steamers et celles des carènes des clippers de Baltimore sur les frégates dont la construction a été votée par le Congrès en 1794. Pourtant, dès 1828, un navire français, la frégate la  Belle Poule, commandée par Joinville, sera à la fois la synthèse de ce qui se fait de mieux à l’époque mais aussi le chant du cygne de la marine de guerre à voiles.

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Demi-couple de la frégate française Amphitrite.

 

Un navire étant construit autour de son maître couple, il est clair que ces formes sont encore loin de celles des clippers.

                                                                                                                                       

Bien qu’elle ait failli être démolie deux fois, les Etats-Unis ont conservé USS Constitution. Elle fait partie des six frégates dont la construction fut autorisée par un Acte du Congrès en 1794. Construite à Boston, Constitution prit la mer en juillet 1798. Les Français la connaissaient bien car elle fut affectée comme navire amiral de l’escadrille de Méditerranée, en 1803, pour mettre les Barbaresques à la raison. Les frégates françaises s'inspireront d'elle tout en gardant un avantage non négligeable avec leurs deux maîtres-couples.

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La Perle, frégate française de 1813.

Dessin de S. Fenoulière, d’après un original du Legs Bretocq.

 

Les formes de cette frégate française sont particulièrement archaïques, par rapport à celles de Constitution, construite quinze ans avant elle. Cependant, ces navires français étaient réputés pour leur excellente marche, à cause de leurs deux maîtres couples et de la carène doublée en cuivre.

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Silhouette des frégates françaises de 1771-1780,, avec deux maîtres couples.

Outre qu'elle constitue une étape importante vers les clippers, la Belle Poule a aussi eu un rapport avec la pêche à la morue sur les Bancs.

Conception de La Belle Poule d'après les documents du S.H.M. Cherbourg

 

 

Après avoir fait ses premières armes lors de l’affaire de La Vera Cruz à bord de la Créole, petite corvette cherbourgeoise, le Prince de Joinville prit le commandement de la frégate.

            Troisième du nom, comme toutes les frégates cherbourgeoises depuis Clorinde (l821), la Belle Poule fut inspirée par les grosses frégates américaines de type Constitution.

La Belle Poule n’a qu'un maître couple, quatorze couples avant et seize couples arrière, et, contrairement à ce qui est fréquemment écrit, elle ne fait pas partie de la série Surveillante, d'après le plan type de cette dernière. Sa longueur entre perpendiculaires est, officiellement  exprimée en mètres,  de 57 m, (175 pieds 6 pouces), sa longueur hors tout, 64,80 m (200 pieds donneraient 64,96m), et sa largeur hors bordage 14,25 m (44 pieds), mais il était bien connu que les bois "travaillaient" sur le chantier. On sait, depuis qu’une plaque a été retirée du fond du bassin partiellement comblé dans l’arsenal de Cherbourg afin de pouvoir mettre à l’eau les sous-marins de nouvelle génération, qu’un pied mesurait 0,3248 m.

Il faut noter un détail techniquement très important et qui a échappé à la plupart des maquettistes modernes : le maître couple est situé en plein milieu de la coque (prise de l'étrave à la poupe), détail qui fait de notre frégate un élément important de la chaîne entre les bricks, les clippers de Baltimore, les bricks et goélettes français sur plan Marestier, et, enfin, les « extreme clippers ». On constate en effet, sur de nombreuses maquettes modernes de la frégate, un déplacement du maître couple vers l'avant et, parfois,une largeur un peu trop grande, ce qui déforme le navire en sabot. D'autre part, les échelles annoncées sont parfois fausses.

Le rapport L / l ( longueur / largeur ) relativement élevé donne un navire fin et très rapide pour son époque, que l'on verra même assurer une des tâches confiées plus souvent à des bricks, une croisière sur les côtes d'Afrique occidentale, dans des régions où l'on pratiquait la traite de façon clandestine depuis son abolition récente par le vote de la loi Victor Schoelcher, avant de se rendre au Brésil. On dit que Joinville, peu pressé d’aller se marier, avait fait traîner un peu cette croisière en longueur.

L’équipage des premières  grosses frégates conçues d’après les modèles américains  les détestait car elles étaient très inconfortables à la mer, contrairement à La Belle Poule.  La muraille est sans rentrée mais l’avant reste très rond. Pourtant, en supprimant la batterie couverte et en diminuant la hauteur des œuvres mortes, en affinant les formes de l’avant, on a une ébauche du futur navire de commerce à trois mâts.

 

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La frégate, telle qu'elle fut armée par Joinville.

Une belle synthèse du plus moderne et du plus « rétro »

 

Par sa longueur, ses pièces en fer, barrots, ridoirs, à partir de 1841, la Belle Poule était un navire extrêmement moderne à son époque, mais ce qui en faisait un navire remarquable et remarqué avait été mis au point par Sané, beau-père de l'ingénieur Daviel, constructeur de la frégate. Cependant, la forme de l'arrière reste  démodée. Notons que, avant son armement, la carène de la frégate fut doublée en bronze d’un côté et en cuivre de l’autre.

La différence de tirant d’eau, plus prononcée que sur Surveillante, permettra de déplacer sans problème le mât d'artimon et d'augmenter largement la surface de voiles en 1841 en ajoutant des voiles goélettes car la voilure de la frégate, en 1840, au retour des cendres,  est réduite et non divisée. Tous les documents d'époque, produits par des témoins oculaires, en font foi ! Il faut noter que le maître couple de la frégate et celui de l’extreme clipper Challenge s’inscrivent tous deux parfaitement dans un cercle. Force est de constater l’extrême similitude entre les deux.

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Demi-couple Clorinde, à gauche, La Belle Poule au centre, clipper américain Challenge, à droite.

D’après les plans originaux de Cherbourg et de la Smithsonian Institution, Washington.

 

Nous ne possédons pas de plan du maître couple de Marité. Cependant, les photos de la coque prouvent que ce dernier est très proche, sinon identique, à celui de Challenge. Surveillante et ses semblables avaient la mauvaise réputation de malmener leur équipage et l'on constate que la muraille presque verticale de Clorinde fait sortir beaucoup plus les canons du cercle que sur La Belle Poule. Il faudra attendre la refonte de 1841 pour voir l'accastillage en fer, car d'après le Journal de Cherbourg, on n'en connaissait pas l’usage en ce port avant le départ de la frégate pour l'escadre de la Méditerranée. Il est dit que c'est avec un vif intérêt que l'on observa les ridoirs en fer sur l'un des deux paquebots à vapeur qui reliaient Bordeaux au Havre avec escale à Cherbourg. Et la  Belle Poule ne contenait que des câbles en chanvre soigneusement lovés dans ses soutes lorsqu'elle quitta Cherbourg en 1839, d’après son plan d’arrimage.

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Couples de la Belle Poule, avec le maître inscrit dans un cercle.

La campagne de Terre-Neuve

 

Dans les années 1980, un sérieux contentieux a opposé les pêcheurs de Saint-Malo aux Canadiens. Le problème ne date pas d'hier puisque la Belle Poule quittait Cherbourg, au mois de mai 1841, pour montrer notre pavillon et faire respecter les droits de nos pêcheurs au large du Canada. La pêche à la morue, en occupant jusqu'à vingt mille pêcheurs, était une pépinière de matelots formés pour la marine de guerre. Le problème s'est trouvé compliqué, à l'heure actuelle, par la présence d'hydrocarbures dans le plateau continental, à proximité de Saint-Pierre et Miquelon. Un tribunal international a rendu son jugement, qui devra être respecté par les deux partis.

Avant de se rendre à Terre-Neuve, Joinville devait aller saluer le roi des Pays-Bas. C'était la première visite officielle d'un Français depuis que ce royaume avait été amputé de moitié, avec l'aide de la France, par la création de la Belgique. Il devait ramener au Roi un labrador.

Lors de la traversée de Neu-Diep à Terre-Neuve par la Mer du Nord, la frégate montra ses  qualités, car le voyage ne fut qu'une succession de grosses tempêtes et de navigation entre les glaces dérivantes. Presque toutes les voiles furent déchirées ou emportées mais le bateau ne subit que des avaries mineures. La  Belle Poule  assura parfaitement sa mission qui se termina par un ravitaillement obligatoire à New York, où elle fut remise en état par les soins du second, le futur amiral Charner. Joinville rendit visite au Président et visita les états peuplés de ce pays neuf et les chutes du Niagara. La frégate réparée retrouva bientôt son commandant et fit route sur Toulon en rencontrant à nouveau de fortes tempêtes accompagnées de neige.

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Terre-neuve.

 

On ramenait, à bord, certains de ces chiens, ainsi que des labradors.

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Marité. Courbure de la coque.

 

La conception de Marité reste plus proche de celle de la frégate que de celle de La Boudeuse, pourtant plus ancienne, mais fabriquée en acier riveté autour d’un maître couple en U.

De la  Belle Poule  au clipper

Ann McKim, considéré comme le premier navire moderne de commerce à trois mâts

 

 

Il serait abusif de prétendre que  La Belle Poule, plus que toute autre frégate, a inspiré les constructeurs américains des « extreme clippers », bien que Joinville affirmât qu'elle fut très admirée à New York, après son voyage à Terre-Neuve. Certains auteurs considèrent la frégate comme un vaisseau rasé, il n’en est rien : la frégate a été conçue dès l’origine comme un navire rapide relativement léger, avec une batterie couverte. C’est un bâtiment long et fin, sa largeur étant nécessairement réduite par peu d'œuvres mortes et par la diminution énorme des masses dans les hauts. La Belle Poule, avec son maître couple au milieu de la coque et son rapport L / l relativement élevé  ( = 4 ) n’est certes pas un « extreme clipper » mais, par ses dimensions, elle est un des jalons remarquables qui mèneront à la construction des clippers purs. Remarquons que le rapport longueur à la flottaison / largeur est de 4, exactement comme sur le Marité.

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Ann McKim.

Communiqué par la Smithsonian Institution, Department of Transports, Washington D. C.

Ce navire nouveau remplace les bateaux construits comme Göteborg.

 

 

L’extreme clipper, navire de commerce exclusivement en bois fut le successeur des bricks et goélettes pour se rendre en Californie en contournant le continent américain par le Cap Horn. De dimensions semblables, en moyenne, à celles de notre frégate, avec sa voilure carrée et son maître couple au milieu de la coque, il fut mis au point par les Américains et connut son apogée lors de la ruée vers l’or en Californie, vers la fin des années 1840, pendant environ deux dizaines d'années seulement, car le train ne traversait pas encore tout le territoire vers l’Ouest, les déserts et les Montagnes Rocheuses représentant des obstacles difficiles à franchir. A cela s’ajoutaient les nombreuses attaques indiennes.

Le Marité, trésor du patrimoine maritime international

Ann McKim, voilure.

 

 

Seul ce plan de voilure peut pousser des puristes à refuser de considérer Marité comme un clipper, à cause du type de gréement. C'est oublier que les premiers trois-mâts banquais furent des clippers purs usagés auxquels on coupa la voilure trop haute, inutile, voire dangereuse pour la pêche à la morue. Nous ferons appel à un expert incontestable en citant Louis Lacroix, dans Les derniers voiliers morutiers terreneuvas, islandais, groenlandais, 1949, pages 69 & 70 de l’édition originale : 

« Au dernier tiers du XIXe siècle, le marasme du commerce maritime décida certains armateurs de petits trois-mâts long-courriers des Antilles, de Bourbon et de l’Inde à vendre ceux de leurs bateaux qui arrivaient à l’âge des premières réparations et qu’ils ne tenaient pas à expédier en de trop lointaines campagnes, sur des mers dépourvues de moyens de réparations , pour des traversées dont la rapidité était un des éléments du succès du voyage.

C’est dans les ports armant aux grandes pêches qu’ils trouvèrent leurs meilleurs clients, car ces navires, après quelques aménagements et modifications, pouvaient encore faire un bon service pour les Bancs et les prix étaient tentants. »

Il ajoute, quelques lignes plus loin :

« On leur coupa leur mâture haute, inutile pour les nouveaux parages auxquels ils étaient destinés désormais ; on réduisit leur voilure et des pompes plus puissantes furent installées à bord. »

Très souvent, on ne garda des voiles carrées qu'au mât de misaine. Mais cette opération n'enlevait rien à la conception du navire lui-même. Les études américaines elles-mêmes prouvent qu'un clipper n'est pas nécessairement un trois-mâts à voilure carrée. Des goélettes et des ketchs ont été classés comme clippers. On peut affirmer, à cause de sa voilure et de sa longueur relativement modeste, que Marité n'est pas un extreme clipper mais un medium clipper, un compromis entre vitesse et capacité de charge. Sa coque et sa carène ont toutes les caractéristiques nécessaires et suffisantes du trois-mâts de commerce en bois répondant à la définition américaine. N’a-t-il pas fini sa carrière commerciale comme cargo et gagné une course à travers l’Atlantique ?

 

 

Le clipper est un navire marchand exclusivement en bois, à trois mâts, non armé, long de plus de trente-cinq mètres et relativement étroit, étudié pour la vitesse (mais qui ne monte que jusqu’à quinze nœuds, exceptionnellement vingt, vitesse record, pour l’époque). La grande majorité des clippers furent des « medium clippers » et non des navires géants, qui restèrent peu nombreux. Contrairement au clipper de Baltimore, dont le maître couple avait la forme d’une coupe à champagne et qui était encore situé sur l’avant de la carène, déformant la coque en sabot, ce maître avait reculé pratiquement au milieu de la coque, comme sur la frégate française Belle Poule. De plus, les constructeurs revinrent à la forme d’un verre à vin. Le nombre de mâts passa parfois de trois jusqu’à six ou sept, avec, pour la majorité d’entre eux, des voiles carrées pour affronter deux océans et le Cap Horn, mais aussi les gréements les plus farfelus, qui donnèrent parfois de graves déboires.On rebaptisa même clippers des navires qui ne l'étaient aucunement. C'était de la publicité mensongère pour des navires éprouvant de graves difficultés à doubler le Cap Horn.

 

Le Marité, trésor du patrimoine maritime international

Extreme clipper Challenge.

Communiqué par la Smithsonian Institution, Washington.

Musée National d’Histoire des Etats-Unis. Division des Transports.

 

Ann McKim, lancée à Baltimore pour le négociant et capitaine Isaac McKim, en 1833, fut le premier navire de commerce considéré comme un clipper pur. Long de  43,58 m, il n’est pas précisé si c’est hors tout ou entre perpendiculaires, large au maître de 9,45 m, ce navire à trois mâts, de 494 tonnes, était le plus grand navire marchand en bois jamais construit jusqu'alors. Par rapport à Marité, ce navire, est beaucoup plus large.

La mise à l'eau d'Ann McKim ne précède la frégate française la Belle Poule que d'un an. Mais la mise sur cale de cette dernière a précédé celle du clipper. Les plans qui nous ont été fournis par des sources fiables sont formels : par la position de son maître couple et par son rapport L / l, la frégate française est en avance sur le navire américain, vers la conception des extreme clippers.

            La position du maître couple, très nettement sur l'avant et sa forme, encore très proche de celle des goélettes pilotes de la Chesapeake, ont permis à certains auteurs américains de dire qu'Ann McKim n'était qu'un clipper de Baltimore agrandi. Le gréement n'est pas le critère principal pour qu'un navire soit un clipper ou non. On note même dans des documents américains sérieux que des goélettes, des bricks et des brigantins étaient des clippers, pourvu que leur carène soit effilée, taillée pour la vitesse. Ceci prouve, également, que le gréement d'un navire de commerce, fût-il clipper ou non, dépend de l'usage que l'on veut en faire et dans quelle aire géographique.

            On considérait manifestement comme clipper tout navire de commerce en bois, non armé, ayant été construit selon les formes modernes, par opposition aux navires de charge de construction antérieure, dont les East-Indiamen, ou le "bric marchand de 180 tonneaux" dont nous avons reproduit le plan, avec leur coque ventrue et la rentrée de leurs œuvres mortes sont les représentants bien connus. On ne les avait pas démolis du jour au lendemain, pour des raisons économiques évidentes, bien qu'ils fussent particulièrement lents, par rapport à ces navires nouveaux. Ils passèrent peu à peu au cabotage ou à la pêche.

Si l'Amérique a été pionnière dans le domaine des clippers, c'est parce que ce pays neuf, en plein développement et indépendant depuis peu, avait besoin de sa propre flotte marchande non seulement pour transporter les marchandises mais aussi pour le peuplement de certains territoires peu accessibles par voie terrestre, comme la Californie. D'autre part, on employait surtout des goélettes sur les Bancs, à cause de leur proximité avec le territoire américain, d'où la disparition assez brutale du clipper aux Etats-Unis lorsque le train et les navires en fer l'ont rendu inutile.

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Marité, à quelques centaines de mètres au dessus des restes calcinés du Soleil Royal.

 

On imagine que le clipper était un très grand navire. En fait, la majorité des "extreme clippers" des années 1850 mesurait en moyenne 56 m. Seulement trente des trois cent soixante-dix clippers américains recensés comme tels dépassaient 64 m, le plus grand étant le Great Republic, de 92 m de long, construit à Boston.

Les hommes ne se transportant pas comme des marchandises, il suffit, cependant, de voir dans quelles conditions les compagnies de paquebots transportaient les émigrants pour être convaincu que cela reste très théorique, on construisit de 1845 à 1859 des "extreme clippers", avec une carène étudiée pour la vitesse et non plus pour un volume de cales important, destinés à passer le Cap Horn le plus rapidement possible avec les aventuriers partant à la recherche de l'or en Californie.

Les différences les plus visibles entre Ann McKim et Marité sont la forme de l'étrave, un peu plus verticale sur ce dernier, et la position du maître couple. Les premiers clippers américains incontestés, comme Witch of the Wave, montrent que le maître, dont la forme est quasiment superposable à celui de la Belle Poule reste sur l'avant, alors que sur les navires français d'Augustin Normand et sur Marité, il est au milieu de la coque ou très près de celui-ci. Ces clippers américains de première génération restent très enfoncés dans l’eau, alors que les medium clippers, compromis entre vitesse et capacité de transport, ont un faible déplacement. On peut considérer que les constructeurs français de navires banquais ont continué longtemps à construire, presque sans le savoir, des "medium clippers", dont Marité est un pur représentant, le dernier connu, en état de naviguer.

 

Le Marité, trésor du patrimoine maritime international

Deux extreme clippers américains de 1851.

 

Les lignes de Witch of the Wave sont relevées sur la maquette de Mariners House, Boston. Aimablement communiqué par la Smithsonian Institution, Division des Transports, Washington.

Sur ces navire, le maître est encore placé relativement loin sur l'avant mais plus près du milieu de la coque, prise de l’extrémité de l’étrave jusqu’à celle de la poupe, sur Witch of the wave que sur Challenge.

 

 

Les trois-mâts sur les Bancs

 

Les trois-mâts firent une apparition tardive sur les Bancs. Le dernier quart du XIXe siècle connut une certaine récession du commerce maritime français, les « tramps » britanniques, "vagabonds de l’océan", transportant une grande partie du fret mondial à des prix défiant toute concurrence. L'ouverture du canal de Suez sonnera définitivement le glas des petits voiliers en bois aux longs cours. Les armateurs français commençaient, très tardivement par rapport aux Britanniques, à faire construire des bateaux en acier, à coque rivetée. De plus, une course au gigantisme pour les long-courriers, seuls économiquement rentables, commençait.

Les premiers trois-mâts banquais, proches, dans leur structure, de Marité, furent donc ces long-courriers rachetés entre 12 et 14 000 francs or de l’époque, d'après Louis Lacroix. Leur mâture trop haute fut coupée, leur voilure transformée, souvent en trois-mâts goélettes et leur cale subit les modifications nécessaires pour loger l’équipage et stocker le poisson.

 

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france chili nettoyé

Long-courrier de type France et Chili, des chantiers Augustin Normand. 1852

D’après Souvenirs de Marine, Amiral Pâris, tome 3, édition originale.

 L à la flottaison = 47,20  m. Tonnage : 613,90 t.

 

 

Le trois-mâts banquais restant à l’ancre pour permettre à ses dorissiers d’aller tendre les lignes et de le rejoindre, souvent dans des conditions météorologiques abominables, tempête de neige, mer grosse, brouillard épais, il n’avait pas besoin de la haute mâture des navires conçus pour traverser les océans le plus vite possible

Le Marité, trésor du patrimoine maritime international

Bateaux Augustin Normand. Le prototype fut lancé en 1852.

Reproduction partielle, d’après Souvenirs de Marine, Amiral Pâris, tome 3, édition originale.

 

Il semble que ces navires n’aient rien à envier aux clippers américains.

Le Marité, trésor du patrimoine maritime international

Marité. Etrave, vue du fond de la cale sèche.

 

On remarque la finesse des lignes et le faible tirant d’eau.

Le Marité, trésor du patrimoine maritime international

 

Cette photo prouve que la coque de Marité est bien celle d'un clipper. Le document montre que le bateau est long et étroit. La position du maître-couple au milieu de la coque donne une forme en fuseau.

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28 juillet 2019 7 28 /07 /juillet /2019 14:09

Aidé par un remorqueur militaire et le remplaçant caennais du remorqueur cherbourgeois, actuellement indisponible, le Tideforce, ravitailleur d'escadre de la flotte auxiliaire de la Royal Navy, a quitté Cherbourg à 17h30 samedi. Long de 200m, c'est le plus récent de quatre exemplaires, lancé en 2018. Ce n'est cependant pas le plus gros pétrolier ayant fréquenté le Quai de France.  Dans les années 1960, les chantiers Bellot faisaient les finitions sur des bâtiments de 250 000 tonnes, tels que le Magdala.

© S. Fenoulière

© S. Fenoulière

Le Tideforce, tracté en marche arrière par le Caen Ouistreham III.

© S. Fenoulière

© S. Fenoulière

Tideforce dans la rade.

© S. Fenoulière

© S. Fenoulière

Tideforce vire, avec ses deux remorqueurs. L'usage prolongé de ces deux remorqueurs par un navire si récent est un peu étonnant, car il n'a pas fait usage de turbines à l'avant. Nous ignorons si c'est parce qu'il n'en possède pas ou pour des raisons de sécurité.

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13 juillet 2019 6 13 /07 /juillet /2019 09:20
Image Naval, copie d'écran

Image Naval, copie d'écran

Le 12 juillet 2019, à 11h15, le Président de la République, Emmanuel Macron, arrive sur le site de l'ancienne DCNS, conceptrice initiale du projet de sous-marins d'attaque de nouvelle génération de type Barracuda, pour lancer officiellement le Suffren.

Dans l'assistance, on remarquait la présence d'un certain nombre d'officiers étrangers, en particulier des Australiens, clients de Naval Group pour le même type de sous-marin mais non nucléaire. Les tensions provoquées par la Chine envers ses voisins ne sont pas étrangères  à l'intérêt provoqué par les sous-marins de type Barracuda chez d'autres clients potentiels.

Image Naval Group, copie d'écran

Image Naval Group, copie d'écran

Un certain nombre de détails relevant du secret militaire, on remarque que les constructeurs cachent la coque au maximum, et beaucoup plus, même, que sur le Triomphant, le premier SNG, dont seule l'hélice pompe était cachée. Cela tient, peut-être, aux équipements particuliers sur la coque, qui n'ont aucune raison d'être sur un SNLE.

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